samedi 20 décembre 2008

HAITI: BILAN 2008

HAITI : BILAN 2008
Pour Arthur Volel, Sony Bastien, Jacques Mésidor disparus en 2008.

Par Michel SOUKAR

2008 : L’année de toutes les catastrophes : irresponsabilité, incohérence, insouciance sur toute la ligne.

Sur le plan politique :

Haïti est encore classé parmi les quatre (4) pays les plus corrompus de la planète par Transparency International qui publie un rapport annuel sur la perception de la corruption dans le monde. Plusieurs questions dominaient le débat politique dans le pays. Parmi elles figuraient celle du renvoi du CEP dirigé par Max Mathurin, celle de la double nationalité et celle de l’organisation d’élections en vue de la mise en place des assemblées locales et du renouvellement du tiers du Sénat.

A. Le Pouvoir Exécutif piétine. Sans vision ni programme, le Président de la République prononçait un discours de pacotille, fade et décousu, le 1er janvier 2008, jour de la commémoration du 204e anniversaire de la proclamation de l’indépendance d’Haïti, sur la Place d’Armes des Gonaïves. En panne d’inspiration et d’imagination, le Président faisait la promotion d’un jus de fruit fabriqué dans le cadre d’un projet de développement local exécuté à Marmelade. Jusqu’à la fin de l’année 2008, Préval restera en panne d’idées positives, tout comme il renoncera à la dernière minute à l’invitation du Brésil de participer au sommet des chefs d’états d’Amérique latine et de la Caraïbe.

Par contre, le discours qu’il prononçait, une semaine plus tard, à l’occasion de l’ouverture de la session parlementaire, était moins pâle. Il s’inspirait du Document National de Stratégie pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté (DSNCRP).

En somme, les projets du Président Préval pour ce deuxième quinquennat ne sont pas nombreux. Ce sont la stabilisation de la situation politique du pays, la révision de la Constitution du 29 mars 1987, la construction des trois (3) centrales électriques fournies par le Venezuela dans le cadre de l’Alliance Bolivarienne pour les Amériques (ALBA), la construction de quelques infrastructures routières importantes.

La stabilisation politique est un processus complexe et long. Elle ne se résume pas simplement à l’organisation d’élections et au renouvellement du mandat présidentiel.

La Constitution de 1987 représente à ses yeux une source permanente d’instabilité dans le pays. Cette Constitution prévoit l’organisation de trop d’élections, la mise en place de trop d’institutions. Son application intégrale coûterait trop chère au trésor public. Peut-être, a-t-il en partie raison? Cependant, le comportement de nos dirigeants depuis 1987 n’a-t-il pas été, lui aussi, cause d’instabilité? Mais la Constitution de 1987 prévoit son propre mode d’amendement. Trois questions figurent à l’agenda du Président Préval : la double nationalité, l’abolition de l’Armée et le renouvellement du mandat présidentiel.

La construction des trois (3) centrales électriques est très avancée à Port-au-Prince, aux Gonaïves et au Cap-Haïtien. Le Président Préval a favorisé la remise sur pied rapide du Centre National d’Équipements (CNE) en vue de la construction des infrastructures routières. Mais il fait face à de nombreuses contraintes financières. Par exemple, l’argent récupéré dans le cadre du Projet Petro Caribe est utilisé à d’autres fins, suite aux dégâts causés par le passage des ouragans.

Le Gouvernement, dirigé par le Premier Ministre Jacques Édouard Alexis, était sous la menace constante d’un vote de censure à cause de son inefficacité. Aucun des projets, figurant dans sa déclaration de politique générale, n’a vu le jour. Le programme d’apaisement social est une illusion, celui de maillage routier une utopie et le plan de développement touristique un leurre.

Entre temps, sur le marché international, les prix du pétrole et des céréales augmentaient. Il en résultait la hausse des prix des produits de première nécessité sur le marché haïtien. La grogne de la population, dénonçant l’augmentation du coût de la vie, se transformait très vite en manifestations violentes dans certaines villes du pays. Le signal, donné par la ville des Cayes, était relayé par d’autres villes dont la capitale Port-au-Prince. Des manifestations violentes s’étaient déroulées durant toute une semaine. Les manifestants s’en prenaient particulièrement à des établissements commerciaux privés et à certaines banques commerciales.

Peu de temps après, un groupe de douze (12) sénateurs prenait le relais des manifestations de rue et réclamait la démission du Premier Ministre Jacques Édouard Alexis. Le processus d’interpellation était mis en branle rapidement. Le 12 avril 2008, le sénat infligeait à son Gouvernement un vote de censure. Cet évènement s’était produit quelques mois après que la chambre des députés lui eut renouvelé sa confiance.

Drôle de coïncidence, le jour de l’interpellation du Gouvernement, la Télévision Nationale d’Haïti (TNH) retransmettait en direct une séance de négociation entre le Président de la République, accompagne du Secrétaire d’État de l’Agriculture, l’Agronome Joanas Gué et deux des plus grands importateurs de riz dans le pays, en vue de parvenir à une réduction du prix du riz sur le marché local.

Ce climat d’instabilité portait la communauté internationale à reporter sine die la conférence des bailleurs sur Haïti. Le financement du DSNCRP est renvoyé aux calendes grecques.

La valse des choix de Premier Ministre débutait. Le Président jette son dévolu sur son ami, l’Agronome Ericq Pierre. Celui-ci est aussi un fonctionnaire international jouissant d’une bonne réputation dans le milieu. Comme sous la précédente présidence de Préval, le 12 mai 2008, la chambre basse, dominée par la Concertation des Parlementaires Progressistes (CPP), rejetait son choix. Le motif était à peu près le même que la première fois : confusion d’état civil. S’appelait-il Ericq Pierre ou Pierre Ericq Pierre? Au cours d’une conférence de presse tenue à l’hôtel Montana, quelques jours après le rejet de son choix, Ericq Pierre fustigeait les députés du CPP qu’il accusait littéralement de corruption.

Puis, c’était le tour de Robert Manuel, un autre ami du Président Préval. La désignation de celui-ci a donné lieu à un débat acide sur le réseau Internet. Ce débat portait principalement sur le caractère de son aïeul, l’ancien Président René Trancrède Auguste. Très vite, les murs des principales rues de la zone métropolitaine de Port-au-Prince étaient couverts de graffitis le proclamant apôtre de la sécurité. Le 12 juin 2008, un mois après le rejet du choix d’Eric Pierre et deux mois après le départ d’Alexis, le choix de Bob Manuel était également rejeté. Il n’était pas propriétaire de biens immobiliers et ne détenait pas de carte d’identification nationale.

Après deux échecs consécutifs, le nom de Madame Michèle Duvivier Pierre-Louis, Directrice Exécutive de la Fondation Connaissance et Liberté (FOKAL), était cité. Le Président Préval engageait des discussions et des négociations avec le parlement et les représentants des partis politiques aussi bien autour du choix du Premier Ministre que de la formation du Gouvernement.

Le choix de Madame Pierre-Louis donnait lieu à un débat moral sur son comportement sexuel. Après maintes protestations et condamnations publiques émanant de plusieurs secteurs, notamment de représentants d’organisations protestantes, des parlementaires réclamaient une déclaration publique de la part du Premier Ministre désigné. Une déclaration sibylline, effectuée à sa sortie d’une réunion, suffisait pour calmer l’esprit de ses détracteurs. Jamais femme n’a autant souffert dans sa pudeur, sa personnalité et sa réputation.

Tout ce débat prenait corps alors que la saison cyclonique battait son plein. Selon les prévisions météorologiques, Haïti se trouvait sur le parcours des premiers ouragans. Des pluies torrentielles commençaient à s’abattre sur plusieurs régions du pays occasionnant l’inondation de nombreuses villes. Quatre ans après Jeanne, Gonaives en a encore fait les frais des inondations.

Après trois mois de tergiversation, le pays était enfin doté d’un Premier Ministre. Cette confrontation entre l’Exécutif et le Législatif affaiblissait fortement l’image du Gouvernement dirigé par Madame Michèle Duvivier Pierre-Louis. C’était un Gouvernement conçu dans l’urgence pour gérer l’urgence.

La première urgence était de venir en aide aux populations sinistrées aux Gonaives, à Cabaret et dans d’autres régions du pays. La deuxième était de reconstruire les infrastructures routières détruites, suite au passage des quatre ouragans qui ont effleuré le pays au cours de la saison cyclonique. La troisième urgence consistait à relancer la production nationale de biens et de services.

Quatre ans après le cyclone Jeanne, Gonaives était encore ensevelie sous les eaux et sous les boues. Comme d’habitude, l’aide humanitaire et les promesses affluaient. Mais la situation de la ville et les conditions de vie de la population n’ont pas changé.

Plusieurs régions étaient coupées du reste du pays : l’Artibonite, suite à la chute du pont de Montrouis et de Mirebalais; le grand Nord, suite à l’effondrement du pont d’Ennery; le Sud, les Nippes et la Grande-Anse, suite à la montée des eaux de l’Étang de Miragoane. Aujourd’hui, des passages de fortune relient ces régions. La construction d’infrastructures définitives se fait toujours attendre.

L’Organisation des Nations-Unies (ONU) lançait un appel d’urgence (flash appeal) de collecte de fonds qui a fait peu d’écho. Les fonds collectés étaient dérisoires par rapport aux besoins à satisfaire.

Le Gouvernement décrétait l’État d’urgence et décidait d’utiliser les fonds générés dans le cadre du Programme Petro Caribe. Un montant de 197 millions de dollars américains est disponible. Les résultats de son utilisation ne sont pas visibles. Manque de transparence qui alimente les allégations de corruptions. Le Parlement est très critiqué sur ce point.

B. Le Pouvoir Législatif est inefficace. Le Parlement est perçu comme un foyer de scandales. La rentrée parlementaire, prévue au deuxième lundi de janvier, s’annonçait sur fond d’incertitude. Le mandat des parlementaires élus pour deux ans arrivait à expiration. Suite à des tractations entre les Pouvoirs Exécutif et Législatif, un compromis était trouvé. Leur mandat était prorogé jusqu’au mois de mai 2008.

Au Parlement, députés et sénateurs se regroupaient. Deux groupes se sont formés à la chambre des députés. Il s’agit de la Concertation des Parlementaires Progressistes (CPP) et de l’Union des Parlementaires pour le Développement National (UPDN).

Le renouvellement du Bureau de la chambre des députés s’est réalisé sur fond de scandale. Un rapport accablant dénonce les dépenses inopportunes, de location de voitures ou d’acquisition de pneus, effectuées par la Questure de la chambre des députés.

Au Sénat, il était également question de renouveler le Bureau. Ce qui donnait lieu à des remous au sein de l’assemblée. Le Président sortant, le sénateur Joseph Lambert, ne partageait pas cet avis. Les sénateurs ont du recourir à l’amendement des règlements intérieurs du Sénat avant l’organisation des élections.

Le Sénateur Kely C. Bastien, de la plate-forme Lespwa, succédait au Sénateur Joseph Lambert, comme Président du Sénat. Le Sénateur Rudolph Henry Boulos en devenait le Vice-président. Cette élection a, semble-t-il, mis le feu aux poudres.

La question de la double nationalité faisait rage au sein du parlement. Le sénateur Jean Gabriel Fortuné ne tardait pas à monter au créneau. Il dénonçait la double nationalité dont semblait jouir le sénateur Boulos. Une Commission, présidée par le sénateur Youri Latortue, était formée pour enquêter sur la question. Cette Commission voulait étendre son mandat au contrôle de la nationalité des Ministres. Le Gouvernement s’y était opposé.

Au terme de son mandat, la Commission déclarait avoir recueilli des éléments de preuve sur la double nationalité éventuelle de deux Sénateurs. Il s’agissait des sénateurs Rudolph Boulos (Nord-Est) et Ultimo Compère (Centre).

Coup de théâtre! Le sénateur Compère n’a même pas attendu la présentation du rapport de la Commission pour s’envoler pour les États-Unis d’Amérique. Alors, qu’il assistait à la foire binationale à Belladère, il en a profité pour traverser la frontière et prendre l’avion en République dominicaine à destination de New-York. Par contre, le sénateur Boulos devait présenter sa démission peu avant l’adoption d’une résolution par l’assemblée des sénateurs, proclamant sa déchéance. Rudy Boulos, lui aussi, s’est réfugié aux États-Unis via la République dominicaine.

L’on se pose la question de savoir pourquoi le Sénateur Boulos avait démissionné avec autant de précipitation, pour se proclamer ensuite Sénateur empêché et intenter une action en justice réclamant l’invalidation de la résolution du Sénat? Sa vie était-il en danger d’autant plus qu’il a été l’objet d’une tentative d’attentat en République Dominicaine quelques mois plus tard?

L’action, introduite dans la juridiction de Fort-Liberté sur une question autre que celle de la nationalité, s’est terminée par un jugement rendu en sa faveur. En effet, le Tribunal de Première Instance de cette juridiction a rendu un jugement proclamant l’annulation de la Résolution du sénat. Évidemment, l’État haïtien a utilisé les voies de recours et l’affaire est aujourd’hui en Cassation. Mais, coup de théâtre, les mêmes Sénateurs qui avaient voté la résolution, remettent la question en débat. Le public éprouve du mal à cerner leur motivation.

A la Chambre des Députés, la Commission chargée d’enquêter sur la nationalité de ses membres a pris plus de temps pour remettre son rapport. Entre temps, le Député de l’Île de la Gonave démissionnait pour cause de maladie. Il devait se rendre par la suite en traitement aux États-Unis d’Amérique. Pourtant, il pouvait solliciter un congé de maladie et continuer à percevoir ses émoluments; puisque jouissant d’un mandat de quatre années. Jusqu'à ce jour, la Commission n’a pas soumis officiellement son rapport à la sanction de l’assemblée des députés.

Le bilan du parlement est maigre. Très peu de lois ont été votées cette année. Son efficacité se mesure par le nombre de séances organisées, par la qualité des débats effectués sur des questions d’intérêt national et par le nombre de lois votées.

Le vote de ratification de la déclaration de politique générale du nouveau Premier Ministre, Madame Michèle Duvivier Pierre-Louis, s’est réalisé dans des conditions difficiles. Bénéficiant du soutien du groupe CPP, elle obtenait sans difficulté le vote de la chambre des députés. Au sénat, la situation était plus compliquée. Le quorum est très fragile. La prise de position catégorique du sénateur Edmonde Supplice Beauzile et celle plus nuancée d’autres membres de l’assemblée des sénateurs rendaient sa ratification peu probable. A un certain moment, il était même question de passer outre le vote du sénat.

La séance de ratification eut lieu dans une atmosphère, marquée premièrement par un vote de rejet. L’abstention des Sénateurs Supplice de la fusion (Centre) et de Joseph Pierre-Louis de l’OPL (Nippes) avait compliqué la donne. Le sénateur Andris Riché de l’OPL (Grande-Anse), qui n’a jamais marchandé ni caché son soutien au Premier Ministre ratifié, s’est jeté a l’eau pour renverser la vapeur et sauver Michèle. Après une rencontre très longue à huis-clos, le vote de ratification a été repris au cours de la même séance, cette fois en l’absence du sénateur Beauzile. Le sénateur Pierre-Louis s’était ravisé et avait voté pour.

Le parlement est ambivalent. Il réclame des postes dans le gouvernement. Il veut recevoir de l’argent du trésor pour exécuter directement des projets. En même temps, il veut assurer le suivi et le contrôle de l’action gouvernementale.

A la fin de l’année, un groupe de sénateurs, conduit par le sénateur Anacacis Jean Hector, menace de sanctionner le Ministre de l’Économie et des Finances. Le sénat est divisé sur la question. Une rencontre est vite organisée entre le Premier Ministre et les Bureaux des deux chambres pour présenter des ébauches de feuilles de route, promises un mois après la déclaration de politique générale.

C’est dans ce contexte que s’est déroulé un atelier de travail entre l’Exécutif et le Législatif sur l’élaboration d’un agenda parlementaire. Le sénateur Anacacis en a critiqué l’organisation de cet atelier avec le financement de la communauté internationale. Ces derniers temps, les parlementaires sont très critiques envers le gouvernement qu’ils jugent peu efficace.

A trois mois du début de l’année fiscale 2008-2009, la loi des finances n’est toujours pas soumise à la sanction du Parlement. Le Premier Ministre avait promis de le transmettre au Parlement le 15 décembre 2008.

Ce jour là, c’est l’arrêté de convocation de la chambre des députés, en session extraordinaire, pour statuer sur ledit Projet, qui lui a été transmis. Les débats s’annoncent orageux. Des voix s’élèvent aussi bien au Parlement qu’au sein de la société civile en vue de la présentation d’un budget décentralisé.

C. Le Pouvoir Judiciaire est inexistant. Malgré le vote des lois portant sur le statut de la Magistrature, celui de l’École de la Magistrature et la création du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ), l’organisation du Pouvoir Judiciaire est restée lettre morte. La séparation et l’indépendance des pouvoirs, prônées par la Constitution de 1987, ne se sont toujours pas matérialisées dans les faits.

Cette fois-ci, l’Exécutif, par l’intermédiaire du Ministère de la Justice, s’est engagé dans un processus dilatoire de validation des membres du CSPJ qui sont soit élus par leurs pairs soit désignés par des organisations des droits humains. Cette procédure devrait précéder le choix des honorables membres du CSPJ. Le Parlement a voté une loi. L’Exécutif ne peut passer outre. Il doit la mettre en application, suite à sa promulgation.

La mission de valider les membres du CSPJ est assignée au Secrétaire d’État de la Sécurité Publique. Ce dernier confie sa réalisation à des agents de la Police Nationale d’Haïti (PNH). Se faisant, l’Exécutif viole la Constitution de 1987 et humilie les membres d’un pouvoir indépendant.

C’est aussi une façon détournée et maladroite de s’opposer au transfert des prérogatives de gestion du Pouvoir Judiciaire, dévolues au Ministère de la Justice sur la base des décrets de mars 1983 et d’août 1995.

Le Ministère de la justice ferait mieux de définir sa nouvelle mission dans la perspective prochaine de l’indépendance du Pouvoir Judiciaire. Cette Mission pourrait se résumer ainsi : servir de conseiller juridique principal du gouvernement, assurer la tutelle de la police, du Parquet et gérer le système pénitentiaire.

Aujourd’hui, sans local ni budget, c’est la communauté internationale qui finance les rencontres des membres du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire. Or, le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) devrait participer à l’élaboration du Pouvoir.

De combien de juges a-t-on besoin pour le fonctionnement des 18 juridictions de la République? Combien devra-t-on former cette année? Quel doit être le budget de l’École de la Magistrature? Quel sera le budget affecté au fonctionnement des cours et tribunaux de la République?

Autant de questions dont les réponses relèvent des prérogatives du Pouvoir Judiciaire. Puis, l’on s’entonnera de l’inefficacité de la justice, de la corruption présumée des magistrats et de l’encombrement des prisons.

La situation de la détention préventive prolongée est toujours préoccupante. Le nouveau ministre de la Justice, Me Jean Joseph Exumé, a formé une Commission, chargée de conseiller le Ministère sur la question. Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a protesté contre la publication du nom de Vilès Alizar, sans son consentement, comme membre de cette Commission.

La lutte contre la corruption, le trafic des stupéfiants et le blanchiment des avoirs, se sont intensifiés cette année. Un cas a défrayé la chronique. Il s’agit de celui de M. Sandro Joseph, Directeur Général de l’Office d’Assurance Vieillesse (ONA). Celui-ci aurait payé cash un véhicule, offert à sa concubine à l’occasion de la Saint-Valentin. L’Unité de Lutte Contre la Corruption, après enquête, a demandé au Parquet de mettre l’action publique en mouvement.

Le nouveau Commissaire du Gouvernement, Me joseph Manès Louis qui remplace à ce poste Me Claudy Gassant, mettait l’action publique en mouvement. Aujourd’hui, le cas est déféré au cabinet d’instruction. Dans cette affaire, M. Joseph se dit victime de machinations et de persécutions politiques. Cette affaire a mis en lumière la pratique de prêts hypothécaires accordés par l’ONA à des parlementaires à des taux bonifiés et sur des périodes dépassant 15 ans.

La Drug Enforcement Agency (DEA), des Etats-Unis, a mené de nouvelles opérations de lutte contre le trafic des stupéfiants dans plusieurs régions du pays. Des présumés trafiquants, arrêtés aux Gonaives, à Jacmel et à Port-de-Paix, ont été transférés aux Etats-Unis pour faire face à la justice américaine. Dans cette dernière ville, la perquisition de la maison d’un proche d’un présumé trafiquant de drogue a permis de découvrir un coffre-fort contenant des millions de dollars américains. Les biens immobiliers leur appartenant, ont été mis sous séquestre par le gouvernement haïtien.

Au début du mois de décembre, une jeune femme nommée Monique Pierre, entretenant des relations amoureuses avec le Commissaire de Police Ernst Bouquet Dorfeuille, affecté au commissariat des Gonaives, a été enlevée dans sa résidence située dans la banlieue Est de Petion-Ville et tuée.

Son cadavre a été retrouvé sur une route nouvellement aménagée non loin du morne à cabris. On la dit très riche et on la soupçonne d’entretenir des liens avec la mafia de la drogue. Son fiancé a été interrogé par le Parquet, en présence de ses avocats. Son cas est déféré au cabinet d’instruction qui l’a inculpé sous trois chefs d’accusation.

Parlant de Parquet, on se souvient de Me Claudy Gassant, ce Commissaire du Gouvernement tout-puissant qui entretenait des relations conflictuelles avec tout le monde sauf avec son maitre Préval. Peu de temps avant l’entrée en fonction du Gouvernement Préval-Pierre-Louis, il est nommé maintenant Ministre Conseiller à la Mission diplomatique haïtienne en République dominicaine. Madame Pierre-Louis ne voulait-t-elle pas gérer les sautes d’humeur du Commissaire Gassant? Puisqu’elle allait occuper le portefeuille de Ministre de la Justice.

Le Directeur Général de la Police semble avoir gain de cause. Le dernier épisode du feuilleton sur le conflit l’opposant à Me Gassant remontait à l’affaire Assad Volcy. Le véhicule de ce dernier, Directeur de la Communication au Palais National, serait soupçonné d’implication dans un cas d’enlèvement à Petion-Ville. N’était-ce l’intervention opportune du Commissaire Gassant, il aurait été arrêté par la police de Pétion-Ville.

Aujourd’hui, on s’attend à ce que Me Gassant mette son talent et son zèle au service des migrants haïtiens, objets des pires traitements dans les bateys et dans les villes frontalières de la République dominicaine. Les relations entre les deux états sont cordiales. Le Gouvernement ne semble pas préoccupé par les conditions de vies inhumaines menées par nos compatriotes en république voisine.

Cette année encore, l’insécurité a fait de nouvelles victimes au sein de la population haïtienne. Les actes de kidnapping ont repris de plus belle. Les femmes et les enfants, particulièrement les écoliers, en sont les principales victimes. Cette situation permet aux partisans des Forces Armées d’Haïti de remettre la question de sa réactivation sur le tapis.

Des militaires démobilisés ont fait entendre leurs voix à Hinche. Au Cap-Haïtien, certains d’entre eux en profitaient pour occuper l’espace de certains bâtiments publics. De plus, la Commission chargée de réfléchir sur la nécessité d’une seconde force publique remettait son rapport.

Ce contexte était aussi propice au renouvellement du mandat de la MINUSTAH pour une année supplémentaire. L’ONU présente Haïti comme une menace pour la sécurité de l’île, de la Caraïbe et de l’hémisphère. Mais après quatre ans et six mois de présence sur le territoire haïtien, quel bilan peut-on clairement dresser de son travail pour conjurer cette menace? La MINUSTHA n’est-elle pas surtout une force de dissuasion? Et combien de temps cette dissuasion doit-elle durer et pour quel résultat?

En termes de performance, le parlement a voté très peu de lois au cours de cette année. La performance de l’Exécutif se mesure à l’aune de la paralysie et de l’inaction. La Justice est en panne.

D. Autres Acteurs de la vie nationale.

Le CEP : La question du renvoi des membres du Conseil Électoral Provisoire (CEP), dirigé par Max Mathurin a dominé l’actualité. On est unanime à reconnaître que c’était un CEP à problèmes. Cependant, on s’interrogeait sur la logique et l’économie d’une telle décision. Il fallait organiser les élections pour le renouvellement du tiers du Sénat et les élections indirectes pour compléter le cycle électoral qui a été initié en 2006.

Ces dernières élections devraient conduire à la mise en place de toutes les institutions indépendantes prévues dans la Constitution de 1987, y compris le Conseil Électoral Permanent. D’aucuns soupçonnent le Président Préval d’être contre l’organisation des élections intermédiaires.

Cette question du remplacement du CEP a donné lieu à des protestations au niveau de la classe politique et de la société civile. Mais cela ne leur a pas empêché de désigner des personnalités pour les représenter dans le nouveau CEP. Par exemple, le nom de Jacques Bernard, Directeur Général de l’ancien CEP, dont le rôle était instrumental à la réussite des élections de 2006, était cité pour représenter la Chambre de Commerce et de l’Industrie d’Haïti (CCIH).

Coup de théâtre ou manœuvre politique! Son nom ne figurait pas sur la liste des membres. Pourtant, il était nommé Directeur Général par Arrête Présidentiel. Nomination éphémère, dirait-on. Il devait démissionner peu de temps après, pour signifier son désaccord à la révision des règlements intérieurs du CEP. Révision qui réduisait les pouvoirs du Directeur Général à celui d’un caporal. Il était remplacé à ce poste par Mr Pierre-Louis Opont, ancien cadre de l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC).

L’absence de gouvernement et les catastrophes naturelles ont considérablement ralenti l’élan du Conseil Électoral Provisoire nouvelle version. Jusqu'à présent, ce dernier n’a pas publié de calendrier électoral. Deux dates hypothétiques, avril et juin 2009, sont retenues pour l’organisation des élections en vue du renouvellement du tiers du sénat. Il se pose la question de l’inscription des nouveaux électeurs et celle de la distribution des cartes électorales par l’Office National de l’Identification (ONI). Le matériel, commandé à cet effet, est disponible. On attend l’ouverture des inscriptions des nouveaux électeurs, la distribution des cartes fabriquées lors des précédentes élections ainsi que le remplacement des cartes égarées.

Le CEP n’inspire pas confiance. Parlementaires et regroupements de partis politiques se plaignent. Ils critiquent le CEP de vouloir les écarter du processus électoral. Ils le critiquent davantage parce qu’il a changé presque tout le personnel des bureaux départementaux et communaux. Il a procédé à un concours pour recruter le nouveau personnel.

L’installation de nouveaux responsables des Bureaux Électoraux Départementaux (BED), s’est effectuée dans une atmosphère de protestation. Dans au moins deux départements (Centre et Grande-Anse), certains membres ne sont pas installés. Dans la Grande-Anse, l’un d’entre eux a même fait l’objet d’arrestation pour implication présumée dans la commission d’infractions pénales. Comment peut-on s’attendre à des élections honnêtes et crédibles quand ceux préposés à leur organisation ne le sont pas?

Les opinions sont divisées sur l’opportunité et la pertinence de l’organisation de ces élections cette année, après autant de catastrophes et de déboires. Leur coût est estimé à 16 millions de dollars américains. Ne faudrait-il pas consacrer cette somme à des activités productives et génératrices de revenus?

L’Université : un nouveau Conseil est élu pour gérer les destinées de l’Université d’État d’Haïti (UEH). Mis à part l’Agronome Jean Vernet Henry, les deux Vice-recteurs, ayant dirigés avec le Recteur Pierre- Marie Paquiot, ont été réélus.

En dépit de ce changement, les facultés ne se portent pas mieux. L’École Normale Supérieure est en crise. Des étudiants de la Faculté d’Agronomie et de Médecine Vétérinaire (FAMV) demandent de participer à la relance de la production agricole.

Ils ont malmené le Ministre de l’Agriculture, l’Agronome François Sevrin. En outre, la capacité d’accueil de l’UEH est dépassée. Il y a plus d’étudiants haïtiens à Santiago en République dominicaine que dans toutes les universités fonctionnant dans le pays.

Les Partis Politiques : l’image et la réputation des partis politiques sont très érodées cette année. Premièrement, la formation du groupe CPP à la chambre des députés a fortement affecté la réputation des partis politiques représentés au Parlement.

La CPP imposait sa loi dans les négociations portant sur le choix des candidats au poste de Premier Ministre et sur la formation du Gouvernement. Elle est devenue une force incontournable sur l’échiquier politique.

Les partis politiques, faisant partie de la Convention et autres regroupements de partis, reprennent du poil de la bête à l’annonce de la préparation des élections.

La Société Civile : elle n’a pas d’agenda spécifique. Elle est en mode réactif depuis l’accession de Préval à la Présidence. Son palmarès n’est pas très brillant cette année.

D’un coté, la Chambre de Commerce et de l’Industrie d’Haïti (CCIH) jointes à l’Association Nationale des Médias Haïtiens (ANMH) et a l’Association des Médias Indépendants d’Haïti (AMIH) ont organisé, avec succès, une journée de levée de fonds au Parc Historique de la Canne à Sucre, en vue de venir en aide aux sinistrés des quatre ouragans qui ont frappé le pays durant la saison cyclonique. Avec la faillite de l’état haïtien et l’inefficacité du secteur privatif haïtien, le marathon s’installe comme mode de gestion de désastres et comme certificat de citoyenneté. Les organisations qui s’occupent d’éducation civique ont du pain sur la planche.

De l’autre, un groupe d’organisations a réagi sur la question de la réforme constitutionnelle et récemment sur la préparation du budget 2008-2009. En outre, un collectif d’organisations a organisé une marche pacifique contre le kidnapping. Suite à cette marche, le collectif a soumis un avant-projet de loi au sénat qui l’a voté sans difficulté.

Par ailleurs, des organisations dites paysannes ont manifesté dans les rues de la capitale pour réclamer le respect de la souveraineté alimentaire. Il faudrait commencer par produire du citron, de la banane et des noix de coco en quantité suffisante pour satisfaire la demande domestique.

Enfin, la commémoration du 60e anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits Humains a donné lieu à des débats très animés sur la ratification éventuelle par Haïti de la Convention des Nations-Unies sur les droits économiques, sociaux et culturels.

Ce débat est vieux, dans la mesure où il remonte à l’époque de la guerre froide. A cette époque, la tendance en était que les pays du bloc socialiste, de tendance plus égalitaire mais moins enclin à l’alternance politique, adoptaient la convention sur les droits économiques sociaux et culturels. Alors que les pays du bloc capitaliste, de tendance inégalitaire mais plus encline à l’alternance politique ne serait-ce qu’à travers l’organisation d’élections truquées, adoptait celle sur les droits civils et politiques.

C’est ainsi, par exemple, que la République socialiste de Cuba a ratifié la Convention sur les droits économiques, sociaux et culturels. Alors qu’Haïti, même sous la dictature des Duvalier, a ratifié celle sur les droits civils et politiques. Il n’est pas étonnant que les conditions de vie de la population soient bien meilleures à Cuba. Alors que certaines libertés publiques sont plus ou moins constatées en Haïti.

E. La Communauté Internationale : La Mission des Nations Unies de Stabilisation en Haïti (MINUSTAH) a rempli tant bien que mal son rôle de force de stabilisation. Elle ne manque jamais l’occasion de rappeler que la mission de développement incombe aux haïtiens.

La MINUSTAH, dans toutes ses composantes, s’est montrée très utile au cours de cette période. Son rôle a été primordial dans l’acheminement des secours quand tous les ponts étaient coupés. Son mandat est reconduit pour un an. Certaines voix et pas des moindres se sont élevées pour réclamer son départ. D’autres plus raisonnables réclament un calendrier de désengagement, moyennant la constitution d’une force de substitution.

D’une façon générale, les organisations du système des Nations Unies, les Agences de Développement international ainsi que les organisations caritatives ont apporté une aide humanitaire substantielle, suite aux catastrophes tant humaines que naturelles qui ont affecté ce pays cette année.

Toutefois, les Haïtiens doivent créer eux-mêmes les conditions de paix et de stabilité indispensable au développement socio-économique du pays.

Sur le plan économique :

Haïti est épinglé par un rapport sur l’environnement des affaires dans le monde. L’économie haïtienne, déjà moribonde, a subi les conséquences de crises majeures tant externes qu’internes. Le premier trimestre de l’année 2008 débutait par l’annonce de la découverte d’un foyer de grippe aviaire dans la province orientale de Higuey. Il a également été témoin de la montée des prix du pétrole et des céréales sur le marché international.

Sur le plan externe, la découverte d’un foyer de grippe aviaire dans la province orientale d’Higuey, en République dominicaine, a porté les autorités haïtiennes à adopter de mesures restrictives sur les importations de produits avicoles en provenance de la République. Ces mesures ont eu pour effet immédiat de renchérir le prix des poulets et des œufs sur le marché haïtien. La viande de poulet était la plus accessible aux petites bourses en Haïti, en raison du caractère modéré de son prix.

Ensuite, la crise pétrolière. Le prix du baril de pétrole atteignait les 140 dollars sur les marchés de Londres et de New-York. Cette crise affectait non seulement la balance commerciale et la balance des paiements du pays, en termes de sortie de devises pour s’en approvisionner, les prix de l’énergie, du transport et de tous les produits associés ou connexes étaient en hausse. L’effet de cette crise sur le coût de la vie de l’haïtien moyen était insupportable.

Puis, la crise alimentaire. L’amélioration des conditions de vie dans des pays émergents et très peuplés, comme la Chine et l’Inde augmentaient la demande de céréales dans ces pays. Conséquence immédiate : les prix du riz, du soja et du blé avaient plus que doublé. Il est résulté la hausse vertigineuse des prix de tout produit complémentaire ou substitut.

En Haïti, comme dans beaucoup d’autres pays moins avancés, les prix des produits de première nécessité avaient dérapé. Cela précipitait dans la détresse et la famine les 40% et plus de la population vivant au-dessous du seuil de pauvreté avec moins de un dollar américain par jour.

Après la grogne, ce fut le tour des manifestations de rues aux Cayes, une ville réputée généralement calme. Le mot d’ordre gagnait d’autres villes. Dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ces manifestations étaient violentes. Les manifestants s’en prenaient aux maisons de commerce et à certaines banques commerciales. Le coût des dégâts est énorme. Le manque à gagner pour le fisc était considérable.

Ces manifestations servaient de détonateur à l’interpellation du Premier Ministre Jacques Édouard Alexis et au renvoi de son gouvernement, suite à un vote de censure infligé par le sénat de la République.

Sur le plan interne, le renvoi du gouvernement marquait le début d’une longue crise politique. Pendant quatre mois, le gouvernement Alexis expédiait les affaires courantes. L’aide financière promise par la Communauté internationale était littéralement bloquée. Cette crise politique aggravait la situation déjà précaire d’une population aux abois.

De plus, le processus de la préparation du budget du prochain exercice, qui démarre généralement en mars de l’année en cours, est retardé. Le taux d’inflation augmentait pour atteindre plus de 18 % en rythme annuel, dépassant toutes les prévisions établies dans le cadre du programme de stabilisation économique.

Le taux de change de la gourde par rapport au dollar américain dérapait également. Ce qui portait la Banque Centrale à intervenir sur le marché des changes pour éviter une dépréciation plus accélérée de la gourde par rapport à la devise américaine. En Haïti, la variation à la hausse du taux de change et l’augmentation du prix du pétrole sur le marché international sont les deux principaux paramètres considérés pour décider de l’augmentation du prix du pétrole à la pompe.

Peu de temps après, les catastrophes naturelles. Depuis quelques temps, la saison cyclonique n’est pas clémente envers le pays qui est constamment sous l’effet de catastrophes environnementales produites par l’homme. Haïti est devenu très vulnérable aux catastrophes naturelles. Cette année, quatre ouragans majeurs ont effleuré les côtes septentrionales et méridionales haïtiennes. Ils ont eu pour nom : Gustav, Hanna, Ike et Josephine.

Quatre ans après le passage du cyclone Jeanne qui avait inondé et dévasté la ville des Gonaives, cette ville se retrouve encore ensevelie sous les eaux. L’Organisme chargé de la Protection Civile recensait plus d’un millier de morts, des centaines de disparus et des centaines de milliers de sans abri sans compter la destruction des commerces et des plantations. Gonaives était paralysée.

L’Artibonite est sans doute le département le plus touché; mais pas le seul. Le plateau central, les Nippes et le Nord-ouest sont également très affectés. Les inondations ont ravagé les plantations, emporté les cultures et endommagé les infrastructures de base.

Dans certaines régions du pays, les infrastructures routières sont détruites et les plantations emportées par les eaux en furie. C’est le cas, par exemple de la ville Cabaret ou une bonne partie des bananeraies était détruite, sans oublier les pertes considérables en vies humaines. Il était difficile voire impossible d’approvisionner certaines régions en carburant.

Enfin, la crise financière. Cette dernière frappe particulièrement certains pays développés occidentaux. Mais ses effets sur l’économie réelle ne se sont pas fait attendre. L’économie de la plupart des pays développés rentre en récession. Les populations de migrants basculent dans le chômage.

Il en résulte la baisse des flux de transferts vers des pays sous-développés. C’est le cas en Haïti où le chômage est déjà endémique. Son taux avoisine 70% de la force de travail. On annonce encore la mise à pied d’au moins un millier d’ouvriers dans la zone franche établie non loin de la frontière nord avec la République dominicaine.

Cette année, Haïti renoue avec la reconduction du budget. La loi des finances rectificative est votée par le Parlement juste quelques heures avant la fin de l’année fiscale 2007-2008, soit le 30 septembre 2008. L’année fiscale se termine avec un déficit budgétaire, évalué à quelques 3 milliards de gourdes. C’est la raison pour laquelle les bailleurs de fonds internationaux ont encouragé le Gouvernement à utiliser les fonds générés dans le cadre du Programme PetroCaribe pour financer le programme d’urgence.

C’est à la fin du premier trimestre de l’année fiscale 2008-2009 que le projet de lois des finances sera soumis à la sanction parlementaire. Donc, il est difficile de prétendre pouvoir améliorer les conditions de vie quand les ressources ne cadrent pas avec l’augmentation d’une population sans cesse croissante.

Sur le plan social :

Une enquête, effectuée par l’institut de sondage Gallup, classe Haïti parmi les pays où la population n’est pas satisfaite de sa qualité de vie. Le jour de la publication des résultats de cette enquête, un correspondant de presse au parlement posait la question à certains députés. Ces derniers ont répondu que les conditions de vie dans le pays sont abominables.

En 2008, le peuple haïtien a vécu dans le désespoir, la désolation, le désarroi et la détresse. Il ne manquait une occasion pour clamer son mal être. A cela, le Président Préval et l’ancien Premier Ministre Jacques Édouard Alexis répondaient qu’ils n’étaient pas des magiciens et qu’ils ne pouvaient opérer des miracles.

Quel est le rôle des dirigeants, si ce n’est de raviver l’espoir au sein de la population? D’ailleurs, c’est sous ce label que la plateforme qui les a portés au pouvoir avait mené campagne et gagné les élections.

Les différentes situations de crise qui ont frappé le pays au cours de cette année, que ce soit la crise alimentaire, la crise pétrolière, la crise politique, les catastrophes naturelles et la crise financière, toutes ont eu des conséquences très graves sur les conditions de vie déjà précaires de la population haïtienne, en général.

A ces différentes crises s’ajoutaient les vagues de révocation dans des entreprises publiques comme la Téléco, l’Autorité Portuaire Nationale (APN), le Service Métropolitain de Collecte des Résidus Solides (SMCRS). Des milliers d’employés, en majorité des gagne-petit, se retrouvaient subitement sans emploi, sans revenu et sans moyens de subsistance.

Ces anciens employés allaient automatiquement grossir l’armée des chômeurs. Le chômage affecte cette année 5 millions d’habitants environ. C’est dans cette catégorie que se recrutent les plus pauvres d’entre les pauvres. Ceux-là vivent dans la pauvreté la plus abjecte. Elles sont les premières victimes des catastrophes naturelles qui se sont abattues sur le pays cette année.

De plus, des centaines de familles pleurent la disparition d’etres chers aux Gonaives, à Cabaret, à Mirebalais et à Hinche. Certaines d’entre elles ont tout perdu. La seule alternative qui s’offre à eux est l’exode. Quand elles ne viennent pas augmenter le nombre de taudis et de bidonvilles, elles traversent la frontière ou prennent la mer à la recherche d’une ville meilleure.

Elles ne sont désirées nulle part. C’est par bandes qu’elles sont rapatriées tous les jours de la République dominicaine, des Bahamas et des États-Unis d’Amérique. Les moins fortunes périssent en mer. Depuis quelques temps, une situation de tension règne dans les villes frontalières entre Haïtiens et Dominicains.

Le tableau s’est davantage assombri avec l’effondrement d’une école, dénommée la Promesse Évangélique fonctionnant à Nérette dans la banlieue de Pétion-Ville. Le bilan des victimes était lourd : une centaine de morts et des centaines de blessés.

Cette école, dirigée par un pasteur de cultes réformés, est construite sur trois niveaux dans un bidonville, sans calcul préalable de la résistance du sol et des matériaux. Les dégâts seraient moindres s’il existait des routes facilitant l’acheminement des secours. Le pasteur est arrêté sous la prévention d’usurpation de titres et d’homicide involontaire. Est-il le seul responsable de cette catastrophe?

Toutes les institutions publiques qui ont failli à leur mission de contrôle sont responsables. La Présidence l’a si bien comprise qu’elle a convoqué les Maires des 140 communes à une retraite au Palais National pour deviser sur la meilleure façon de lutter contre les constructions anarchiques qui sont légions dans le pays.

Un pays ne meurt pas, dit-on. Mais Haïti agonise sous le poids de l’incohérence, de l’irresponsabilité et de l’insouciance de ses fils, de ses gouvernants, de ses élites aussi bien morales, politiques qu’économiques.

Cette année, le temps n’est ni aux souhaits ni aux vœux pieux. Consacrons-le à la réflexion citoyenne. Une réflexion qui doit éveiller la conscience des élites haïtiennes sur leur mission véritable qui est de travailler au bonheur du peuple haïtien.

Toutefois, le peuple doit vouloir vivre heureux et le décider collectivement. Il doit commencer par confier la gestion de ses destinées à des dirigeants honnêtes, responsables, compétents, soucieux de son avenir et de celui des enfants.

Quand on confie un pouvoir même en haillons à des chefs de bandes qui se pavanent en hommes d’État, on plonge l’avenir dans la nuit. Les Haïtiens ont-ils les ressources matérielles, intellectuelles et morales pour se tirer du gouffre sans passer par une tutelle efficace? En ce début du 21ème siècle, Haïti est un navire sans gouvernail avec une caricature de capitaine. Dans un pays de misère profonde, d’ignorance crasse, avec un système d’électrocratie malsaine poussant sur le terreau fertile d’une société corrompue et largement analphabète, l’écrasante majorité ne vote pas ce qu’elle mérite mais ce qui lui ressemble, la démagogie et l’argent sale aidant. Si Barack Obama était Haïtien, nos compatriotes, pour la plupart, l’auraient vu comme un métis dérangeant et lui auraient préféré un nul sans programme, sans langage, un politicien de pacotille pataugeant comme eux dans la médiocrité ambiante et parfait joujou de nos affairistes cyniques et méprisables. Il ne resterait à Barack qu’à se caser dans un poste d’ONG ou d’un organisme international ou à se refugier à l’extérieure. Pendant combien de temps, Haïti sera-t-elle encore considérée comme un comptoir par des escrocs tant nationaux qu’étrangers, marchands d’une « démocrassie » qui signifie tout le monde dans la crasse? Dans ce pays où, parait-il, Dieu devra prouver qu’il existe, tant sont immenses la lâcheté, l’égoïsme, l’incapacité d’apprendre et de comprendre de la plupart de ceux qui l’habitent, la fin de la descente aux enfers dépend-t-elle encore de la volonté, de l’intelligence et du courage d’un groupe d’Haïtiens?

Michel SOUKAR
Décembre 2008

lundi 24 novembre 2008

HAITI: LE POPULISME AURA-T-IL RAISON DE NOUS?

Haiti : Le populisme aura-t-il raison de nous ?

dimanche 23 novembre 2008

Par Nancy Roc

Soumis à AlterPresse le 22 novembre 2008

Selon un vieil adage, le pouvoir corrompt tout homme. En Haïti, il transforme les hommes en fauves. De Faustin Soulouque au général Nord Alexis, de François Duvalier à Jean-Bertrand Aristide, l’histoire de notre pays regorge de ces fauves. Depuis 1804, la culture et l’intelligence ont systématiquement été rejetées par les élites politiciennes au profit de l’intérêt personnel des uns et financier des autres. Deux cents ans plus tard, « si les hommes politiques et les diplomates peuvent se permettre de jouer avec les mots, les scientifiques sont bel et bien obligés de tenir compte de l’évidence des faits : Haïti est un pays naufragé, un État effondré », constate le politologue Sauveur Pierre Étienne dans son livre intitulé « L’énigme haïtienne : échec de l’État moderne en Haïti » [1]. La corruption, la terreur programmée et l’anarchie téléguidée ont conduit notre pays au bord du gouffre. Depuis 1990, le populisme lavalassien l’y a finalement précipité.

La tragédie de Nérette est le symbole de ce populisme mortifère : des dizaines d’enfants ont payé de leur vie l’irresponsabilité des autorités qui, depuis 18 ans, préfèrent utiliser le peuple à des fins politiciennes au détriment de toute logique, d’un minimum de sécurité nationale. « Haïti est un pays où la norme est d’être hors normes », fait remarquer le psychiatre canadien d’origine haïtienne, le Dr Joël Des Rosiers, suite à ce drame. « Nous ne fonctionnons pas au nom de la Loi. Il faut donc construire une culture de la Loi car aucune communauté de citoyens ne peut survivre sans des règles, sans des normes, sans des lois », souligne-t-il. « La justice est le plus grand opérateur de solidarité dans un pays. Si nous n’arrivons pas à construire l’édifice de la Loi, nous ne pouvons pas constituer un pays » [2], soutient-il. Et le Dr Joël Des Rosiers conclut qu’en l’absence de justice et de lois, Haïti est vouée à l’anarchie.

Une inorganisation …organisée

À Port-au-Prince, cette anarchie s’étale et s’étend au vu et au su de tous. Dans cette capitale du non-droit, au nom du populisme, il est interdit d’interdire. La problématique de l’aménagement du territoire haïtien relève d’une situation de fait qui se manifeste de manière graduelle dans le pays depuis environ près de cinq décennies et s’est accentuée au cours de ces 20 dernières années : l’organisation de l’inorganisation de l’ensemble du territoire national [3].

Si l’on considère le territoire complet d’une nation comme « un système organisé composé de cellules, d’organes différenciés et de réseaux dans lesquels circulent l’influx nerveux et le sang qui doivent atteindre toutes les parties du corps [4] », il s’avère, dès lors, nécessaire de poser au départ le principe de sa structuration et de son organisation réelle. Sinon, l’on risque d’encourager et de perpétuer les résistances psychologiques au progrès, les blocages et les freinages matériels compromettant la croissance et le fonctionnement des organes nouvellement créés [5].

Si l’aménagement du territoire est une approche synthétique et rationnelle visant le modelage d’un cadre physique, d’un espace géographique, alors Haïti et notamment sa capitale, nous renvoient la monstruosité de notre irrationalité. D’un côté, l’État ne maîtrise pas l’espace, de l’autre, le peuple a pris d’assaut les mornes et leurs versants dans une dangereuse et constante pulsion qui se rapproche davantage de la mort que de la survie. Ceci s’explique notamment par le fait que « les problèmes d’ordonnancement de l’espace et d’harmonisation des relations de l’homme avec son milieu n’ont pas encore acquis de valeurs sociales en Haïti, c’est-à-dire qu’ils n’arrivent pas à s’imposer à la conscience du plus grand nombre » [6]. Tout comme elle se manifeste aujourd’hui au niveau de l’organisation du territoire national par trois (3) grands fléaux :

• La décapitalisation massive des moyens de production ;

• L’urbanisation sans industrialisation liée à un développement anarchique accéléré au niveau des grandes villes et des villes moyennes ;

• l’hypertrophisation et le congestionnement de Port-au-Prince, la capitale.

Les préoccupations explicites d’organiser le territoire national remontent aux années 1969 lorsque certaines études ont révélé la nécessité d’un aménagement volontaire du pays afin de combattre le développement monopolaire de la capitale et réduire les disparités constatées au niveau des principales villes du pays. Deux grandes périodes ont marqué l’expérience haïtienne en matière de pratique d’aménagement du territoire : la première dominée par l’idée de régionalisation remonte aux années 1971 jusqu’en 1987 ; la seconde caractérisée plutôt par la décentralisation et la planification de type territorial, part de l’adoption de la Constitution en 1987 et ce jusqu’ à nos jours. Aujourd’hui, en dehors de la Constitution, aucune ligne directrice précise n’a été définie.

Entre démagogie et lâcheté

Aujourd’hui, l’État complice, concepteur et promoteur de cette anarchie, se retrouve être le gouverné au lieu d’être le gouvernant. Les constructions sont illégales mais leurs propriétaires revendiquent le droit d’être dédommagés par l’État si leurs propriétés sont détruites. Idem pour les marchandes : n’importe qui installe son petit commerce dans la rue, mais pour déplacer les marchandes il faut leur trouver une alternative, un autre espace, construire un autre marché pour elles. Aucune sanction n’est imposée et, pis encore, plus on est illégal, plus on a le droit de revendiquer. À ce rythme là, il faudrait une autre capitale pour répondre aux besoins de tous ceux qui, au nom du populisme, passent du stade de l’illégalité à la compensation sans avoir jamais rempli un minimum des devoirs du citoyen !

La démagogie et l’irresponsabilité du pouvoir exercé par Jean-Bertrand Aristide et René Préval sont en train de nous exploser en plein visage. « Aristide a utilisé les méthodes habituelles du leader populiste (encadrement de la société par la terreur, les médias, le parti, la fraude électorale, la corruption), il s’est trouvé aussi affaibli par les limites de ses soutiens (milices armées incontrôlables, rôle incertain des mafias de la drogue, division interne à son parti, faiblesse de la police haïtienne, isolement international). Dans ce contexte, malgré la terreur imposée aux intellectuels et à l’opposition, il n’a pas su empêcher la montée en puissance des mécontentements. Le peuple, manipulé, a, dès les années 2000-2002, abandonné celui qu’il a adulé, disqualifiant alors le populisme aristidien, en dictature propre, de type néo-duvaliériste, si l’on s’en réfère à la culture politique haïtienne (…) Il a échoué dans tous les domaines, sombrant dans une démagogie et un discours sans prise sur l’opinion. Le régime d’Aristide ne fut qu’un populisme de misère, indigne, pour un peuple digne toujours en quête de démocratie ». [7]

À la chute d’Aristide en février 2004, le gouvernement de transition avait l’opportunité historique de mettre de l’ordre dans le désordre qui caractérise le pays. N’ayant ni à plaire ni à dépendre d’un électorat, ce gouvernement aurait dû – et nous l’avions souvent écrit à l’époque- imposer des mesures peut-être impopulaires mais urgentes dans les grands dossiers empoisonnants le devenir de la nation : la lutte contre la corruption et le trafic de la drogue, l’aménagement du territoire, la lutte contre la mafia environnementale, pour ne citer que ceux-là. Malheureusement, le Premier ministre Gérard Latortue s’est révélé être un lamentable chef de gouvernement : « un pantin, une personnalité politique creuse et sans consistance qui se contente uniquement d’exécuter les ordres de ses maîtres. Rongé par l’ambition, attiré particulièrement par les avantages que procure le pouvoir, Gérard Latortue (…) a été, politiquement, un lâche et un irresponsable sans vergogne fuyant ses responsabilités gouvernementales pour se courber devant le diktat d’une certaine communauté internationale incarnée par les États-Unis, la France, l’Union Européenne, Gabriel Valdez le représentant de l’ONU et un général Brésilien, commandant de la force militaire d’occupation. Le tandem Latortue-Alexandre s’est révélé ainsi comme une vulgaire caricature institutionnelle imposée par l’étranger pour masquer la mise sous tutelle accélérée du pays décrié ingouvernable et en faillite totale. » [8]

Or, comme l’a souligné le politologue Sauveur Pierre Étienne, le défi de « la (re)fondation de l’État-nation, impliquant une société inclusive, permettant la transformation des individus en citoyens à part entière, ayant les mêmes droits et les mêmes devoirs envers l’État, qui ne peut être qu’un État démocratique de droit », incombait au technocrate, à l’expert en ingénierie politique et, surtout, au politique. [9]

Gérard Larortue s’est révélé être un fourbe et clown politique dont les pitreries ne faisaient rire personne. Quant aux élections organisées par son gouvernement, elles n’ont rien résolu et encore moins concrétisé une véritable transition démocratique, vu la complexité du cas haïtien. Le peuple haïtien a été maintenu dans sa misère et dans sa solitude amère loin des préoccupations mondialistes. René Préval a été réélu en s’arrogeant le droit d’être le seul candidat à la présidence au monde à se présenter sans programme et sans même daigner s’adresser à la presse nationale. À la veille du premier mandat présidentiel de René Préval, Jean-Bertrand Aristide, parlant de son « frère jumeau », eut à déclarer à l’hebdomadaire français L’Express, ce constat lapidaire : « entre l’incompétent et le nul, il se rapproche davantage du nul ». Le vin était tiré.

Un pays livré à lui-même

« Si l’État est fort, il nous écrase. S’il est faible, nous périssons », disait Paul Valéry [10]. Dans la diaspora, beaucoup d’Haïtiens ont de plus en plus le sentiment que le pays dégage un parfum de fin du monde. On a beau réfléchir, mais force est de constater qu’au terme de 18 ans de populisme lavalassien, « il n’y a pas d’État moderne, pas de citoyens, pas de société civile, pas d’espace public, pas d’opinion publique et pas de démocratie. » [11] Même si, en 1986, le peuple haïtien s’est libéré de la dictature, les élites politico-sociales ont conservé les mêmes réflexes de caudillisme…sans chef militaire. Il est affligeant de constater avec quelle facilité le grand nombre est gouverné par le petit et l’humble soumission avec laquelle les Haïtiens sacrifient leurs sentiments et leurs penchants au profit des caprices de leurs petits chefs. Sous Jean-Bertrand Aristide, cette soumission a atteint son paroxysme et elle se poursuit sous le second mandat de René Préval.

Pourtant, la pensée politique veut que ce soit sur « l’opinion que tout gouvernement est fondé, le plus despotique et le plus militaire aussi bien que le plus populaire et le plus libre » [12]. Dois-je ajouter, le plus mièvre aussi ? Que nous réserve l’inexistence de l’État ? On a l’impression qu’après l’effondrement de l’État et de la société, le pays est, physiquement, à bout de souffle et s’écroule littéralement sur nous et sur nos enfants. Gouvernants et gouvernés se trouvent dans une dynamique d’entonnoir : les premiers, impuissants, ne font que constater les dégâts ; les seconds, complètement démoralisés, subissent encore sans avoir la force de protester. Le pays s’est transformé en une nation de zombies livrée à elle-même. Une nation pathétique, davantage encore que celle décrite par l’écrivain Jean Métellus.

Les dernières déclarations du président et du Premier ministre, suite au drame de Nérette, n’ont rien de rassurant. Au cours d’une cérémonie spéciale en mémoire des victimes de l’effondrement de l’école La Promesse Evangélique, le chef de l’État, René Préval, a indiqué qu’une « mauvaise compréhension de la démocratie est à l’origine du désordre dans la construction des bâtiments ». Il estime que les catastrophes actuelles sont les conséquences de nos mauvais comportements et sont liées au fait que « depuis 50 ans, nous n’avons fait que ce que nous voulions ». Il a toutefois omis de dire que sur ces 50 ans, il a « conduit » les affaires du pays pendant 18 ans, de concert avec son « frère-jumeau » Jean-Bertrand Aristide. En effet, ces deux anarcho-populistes n’ont fait que ce qu’ils voulaient et aujourd’hui, la population en paye un lourd tribu avec la vie de ses enfants ! Quant aux promesses du président de « mettre de l’ordre dans les constructions anarchiques », elles reflètent encore la démagogie qui a caractérisé le populisme lavalassien depuis 1990. En effet, ce dernier puise tout son capital politique des bidonvilles et aux sources du sous-prolétariat. Déplaire à cet électorat ébranlerait les fondements du populisme et René Préval n’a ni le courage et encore moins l’envergure de changer de vision pour assurer la sécurité de « son » peuple. Quant au Premier ministre Michèle Pierre-Louis, dépassée par les événements, elle est vraisemblablement incapable de s’imposer au président populiste. La déclaration de Mme Pierre-Louis concernant les constructions anarchiques est éloquente : « Ce serait chimérique de penser qu’on peut détruire toutes les constructions anarchiques », assure-t-elle, appelant de préférence à un effort pour faire respecter des normes standards et, pour y parvenir, elle entend passer à l’action en …mettant des affiches pour empêcher d’autres constructions, notamment sur les versants du Morne l’Hôpital ! [13] Sans commentaires !

La boîte de Pandore

L’imposture du populisme semble être à son comble et, pourtant, le pire est à venir. En effet, l’incapacité de René Préval et de ses gouvernements successifs de faire face aux besoins élémentaires de la population, ajoutée aux catastrophes en série qui ont affecté le pays en moins de quatre mois, ouvrira la voie au retour en force sur la scène politique du Parti Lafanmi de Jean-Bertrand Aristide. (…) L’audace des lavalassiens est sans limite. En témoigne l’intervention du sénateur Rudy Hériveau qui, à l’occasion du 10ème Sommet international sur le crime transnational organisé les 13 et 14 novembre 2008 à Paris, a demandé aux responsables de Transparency International de réviser les critères sur le classement des pays dits les plus corrompus du monde. « Il n’est pas normal qu’Haïti soit classé au quatrième rang des pays les plus corrompus du monde alors que ces dernières années beaucoup d’efforts ont été consentis par les autorités pour combattre la corruption » [14] , a osé proclamer celui qui, en 2004, caché dans l’enceinte de la Télévision Nationale d’Haïti, lançait des pierres sur les manifestants et les étudiants qui, dans la rue, réclamaient par milliers le départ d’Aristide.

Au nom du populisme, Jean-Bertrand Aristide et René Préval ont utilisé le préjugé de classe et de couleur pour diviser la société haïtienne et mieux régner sur leurs intérêts et ceux de leur clique de prédateurs, « les grands mangeurs ». Pour ce faire, ils ont systématiquement rejeté l’intelligence au profit d’un clientélisme basé sur le militantisme et la soumission au chef. Ils ont aussi fait barrage à la participation de la diaspora dans les affaires du pays en sectionnant tous les grands canaux de transferts de connaissance vers la terre natale. Ils ont donné au peuple l’aversion du savoir, du respect et du mérite de peur que ces valeurs ne lui fassent connaître les erreurs où on l’a plongé. Les partisans de l’absurde ont si bien réussi dans leur machiavélisme, qu’il devient dangereux de les combattre. Il importe peu à ces imposteurs que le peuple soit ignorant pour souffrir qu’on le désabuse. Lors de la cérémonie spéciale en mémoire des victimes de l’effondrement de l’école La Promesse Évangélique, le chef de l’État, René Préval, a appelé les politiques à mettre fin aux querelles intestines, en soutenant que la stabilité permettra d’éviter de nouveaux drames [15]. Ce que le président ne comprend toujours pas c’est qu’un peuple pauvre, qui a faim et qui est désespéré, n’est tout simplement pas compatible avec la sécurité et la stabilité [16]. À plusieurs reprises, le président a déclaré que la Constitution était une source d’instabilité. Que personne ne s’étonne qu’en 2009, il la mette de côté d’un revers de main pour briguer un troisième mandat et, qui sait, peut-être même rétablir la présidence à vie. Ainsi, contrairement aux dires de René Préval, ce n’est pas la Constitution qui est une source d’instabilité mais bien ces fauves populistes à l’appétit de prédateurs dont l’absence de vision et de leadership ces deux dernières décennies, entraîne le peuple haïtien dans les abysses du sous-développement.

Aujourd’hui, la société haïtienne, dans son marronnage perpétuel et ancestral, s’est repliée sur elle-même et est de nouveau contrainte de déguiser la vérité ou de se sacrifier à la rage des faux savants, des populistes, des âmes basses et intéressées. Si la société ne se ressaisit pas dans un sursaut collectif, Haïti deviendra une véritable boîte de Pandore ou un gigantesque cimetière.


[1] Sauveur Pierre ÉTIENNE, L’énigme haïtienne : échec de l’État moderne en Haïti, Montréal, Presses de l’Université de Montréal/ Mémoire d’encrier, 2007.

[2] Émission Metropolis de Radio Métropole, le 15 novembre 2008.

[3] Jean Mercier PROPHETE, La problématique de l’aménagement du territoire en Haïti, Colloque de Trois –Rivières /Québec, Août 2002.

[4] A. Platier, Communication sur l’Aménagement du Territoire, Université Libre de Bruxelles, Belgique 1971.

[5] Jean Mercier PROPHETE, La problématique de l’aménagement du territoire en Haïti, Colloque de Trois –Rivières /Québec, Août 2002

[6] Ibid, page 2.

[7] Laurent Jalabert, Un populisme de la misère : Haïti sous la présidence Aristide (1990-2004), Revue de Civilisation Contemporaine de l’Université de Bretagne Occidentale EUROPES / AMÉRIQUES, http://www.univ-brest.fr/amnis/

[8] Jean-Claude Cambronne, L’honneur perdu de Gérard Latortue, le 20 août 2005.

[9] Sauveur Pierre ÉTIENNE, op. cit. p. 300.

[10] Valéry Paul, « Fluctuations sur la liberté », dans Regards sur le monde et autres essais, Paris, Gallimard, 1945, p. 63.

[11] Ibid., p. 328.

[12] David Hume / 1711-1776 / Essais politiques

[13] Radio Métropole, Michèle-Pierre Louis n’envisage pas de démolir les constructions anarchiques, le 14 novembre 2008.

[14] Le Nouvelliste, Corruption : Transparency International appelé à réviser les critères, le 17 novembre 2008.

[15] Radio Métropole, Préval entend interdire les constructions anarchiques, 14 novembre 2008.

[16] Hédi Annabi, Conférence de Presse à New York, 10 novembre 2008.

dimanche 16 novembre 2008

HAITI: ROLE DU GOUVERNEMENT FACE A LA FLAMBEE DES PRIX ET AUX CATASTROPHES NATURELLES

Haïti : Rôle du gouvernement face à la flambée des prix et aux catastrophes naturelles

samedi 15 novembre 2008

Débat

Par Jean-Eric Paul [1]

Soumis à AlterPresse le 10 novembre 2008

Le gouvernement haïtien, est-il impuissant face à la flambée des prix des matières premières et aux dégâts de catastrophes naturelles, ou ignore-t-il les mécanismes de gestion des risques ?

Haïti, victime des émeutes de la faim, a été tout récemment frappée de plein fouet par 4 ouragans successifs causant des dégâts énormes, comme si la flambée des prix de produits de première nécessité n’était pas suffisante au malheur du peuple haïtien. La ville des Gonaïves, où les plaies du cyclone Jeanne sont toujours visibles, en a payé un lourd tribut.

Durant le mois d’avril 2008, la population a vu le prix du sac de riz de 50 kgs passer de 35 à 70 dollars, les prix des trajets de bus augmentés environ de 30 à 50%.

Cette situation a poussé le peuple dans la rue, réclamant du gouvernement la baisse des prix de produits alimentaires. Des violentes manifestations ont éclaté, causant la mort de plusieurs personnes, de dizaines de blessées et de nombreux commerces pillés.

Devant une telle colère, le Sénat de la république fut contraint de voter une motion de censure contre le Premier Ministre Jacques Edouard Alexis.

Ces événements malheureux ont montré au grand jour la nécessité de mettre en place des mécanismes permettant d’amortir les chocs liés aux variations des prix de matières premières.

Combien de fois avons-nous entendu le gouvernement expliquer qu’il ne peut rien face à la hausse des prix des matières premières sur le marché international ? Est-il vraiment impuissant ou ignore-t-il les mécanismes de gestion des risques liés aux matières premières ?

Dans ce qui suit, nous présenterons, dans un premier temps, certains mécanismes couramment utilisés pour gérer de manière efficace les risques liés aux variations de prix des matières premières. Nous montrerons, lors même que les prix augmenteraient sur le marché international, qu’il existe des mécanismes permettant de neutraliser l’impact sur la population. Et dans un deuxième temps, nous présenterons quelques autres techniques applicables à la gestion des grands risques liés aux phénomènes climatiques (ouragans, tremblements de terre, sécheresses, les inondations etc).

Gestion efficace des risques liés aux variations des prix de matières premières

Pour combattre la vie chère, le Président René Garcia Préval préconise la valorisation de la production nationale. C’est une mesure qui va dans le bon sens et nous l’encourageons grandement à mettre en place cette politique volontariste.

Face à l’envolée des prix des denrées alimentaires, le Sénégal a défini un programme volontariste d’autosuffisance en riz à l’horizon 2015. Pour cela, le pays a importé plus de 500 tracteurs d’origine indienne et environ 3 000 pompes allant jusqu’à 400 M3/H.

Nous encourageons le Président Préval à faire mieux que le Sénégal en acquérant davantage de matériels, en organisant les paysans en coopératives mieux structurées pouvant bénéficier des crédits et sans oublier la mise en place d’un mécanisme d’assurance pouvant les couvrir contre les aléas de la nature.

Ces mesures permettraient de diminuer le degré d’exposition du pays aux risques de variation des prix de certains biens que nous pouvons produire. Ce ne serait pas le cas du blé ou du pétrole.

Haïti n’est pas le seul pays à être assujetti aux variations de prix de matières premières. Des compagnies aériennes comme Air France, American Airlines et British Airways sont autant exposées à la volatilité de prix du pétrole. Certes, il y a une infirme répercussion sur le prix des billets, mais pas dans les mêmes proportions que l’augmentation opérée sur les trajets de bus en Haïti.

Cette grande différence s’explique par le fait que ces compagnies utilisent certaines techniques leurs permettant d’amortir la hausse de prix du kérosène.

Quelles en sont ces techniques ?

La constitution de stock stratégique de régulation du marché national

Certains Etats ont constitué des réserves stratégiques en matière de pétrole, de médicaments, de produits alimentaires etc., en cas de crise d’approvisionnement.

La première mesure simple, que nous préconisons, au gouvernement, pour gérer les risques liés aux variations des prix de matières premières, est la constitution des stocks stratégiques sur un panier de biens de base, dont les prix seraient rigides à la hausse. Ce panier concernerait des biens de base, tels que le sel, sucre, farine, riz, haricot, mais, huiles, gasoil etc.

Pour chaque bien constituant le panier, l’Etat devrait constituer des stocks stratégiques et définir un prix limite d’intervention. Ce prix limite serait un seuil insoutenable pour la population.

Exemple du prix de riz

Si le prix sur le marché national atteint le prix limite, l’Etat interviendrait sur le marché en utilisant son stock stratégique pour maintenir le prix du riz en dessous du prix limite.

Cette approche peut être combinée avec un rôle plus efficace de la Banque Centrale dans la conduite de la politique monétaire. La priorité devrait être la lutte contre l’inflation et le renforcement du pouvoir d’achat.

Cette politique de renforcement du pouvoir d’achat passe nécessairement par un renforcement de la monnaie nationale. Nous ne croyons pas que cela n’handicaperait pas les exportations du pays, car la concurrence ne se fait pas uniquement que par les prix. Elle se fait aussi par la qualité des produits.

L’effet d’habitude dans la consommation (mangues haïtiennes), les produits bios et produits du commerce équitable sont autant d’exemples montrant qu’un prix légèrement élevé d’un bien n’entraîne pas nécessairement une baisse de la consommation de ce bien. Au contraire, les consommateurs sont prêts à payer plus cher pour des produits de qualité.

Le pétrole et les autres matières premières sont libellés en dollars $. Une gourde qui s’apprécie par rapport au dollar $, permettrait de réduire la facture du pétrole et des matières premières.

L’exemple d’un Euro fort par rapport au dollar $ permet aux Européens de diminuer considérablement leurs factures pétrolières.

De plus, notre pays importe beaucoup plus qu’il en exporte. Cette politique serait du bon sens.

Beaucoup de pays jouent sur leurs monnaies pour défendre leurs intérêts. Les Américains, les Européens l’ont fait dans le passé. Et pourquoi pas nous ? Serions-nous moins intelligents que les autres ?

La sous-évaluation de la devise chinoise (Yuan) permet à ce pays de doper son commerce extérieur, à telle enseigne qu’actuellement ses réserves de change dépassent plus de 1 000 milliards $. Ce trésor de guerre est issu des excédents commerciaux enregistrés par la Chine. La sous-évaluation du yuan a permis à la chine d’inonder les marchés extérieurs de leurs produits bon marché.

Utilisation des produits dérivés comme moyen de couverture contre le risque de variation des prix

Pour neutraliser les effets des augmentations des prix des matières premières, les grandes entreprises cherchent le plus souvent soit à répercuter les augmentations sur leurs clients, soit à négocier avec leurs fournisseurs des contrats à prix fixe sur le long terme. Cela avec beaucoup de difficultés, car, d’une part, il y a la concurrence qui joue en cas de forte répercussion de prix sur les clients et, d’autre part, les prix des fournisseurs sont réévalués périodiquement.

C’est la raison pour laquelle ces entreprises ont recours, de plus en plus, aux produits dérivés.

Au cours des dernières années, la demande de couverture contre les fluctuations des prix de matières premières au moyen de produits dérivés a connu une croissance incroyable. Ces produits permettent de gérer de manière efficace tout type de risque.

Ces produits dérivés sont les swaps, les contrats FUTURES et les options.

Beaucoup de ces produits s’échangent sur les marchés organisés, tels que le Chicago Mercantile Exchange ou encore sur le marché londonien London International Financial Futures and Options Exchange (LIFFE). Il existe aussi des marchés de gré à gré ou marché « hors cote » pour des produits faits sur mesure.

Ces produits de couverture sont à la portée de l’Etat haïtien et le pays peut parfaitement se protéger contre les risques de hausse du pétrole, du blé, du riz, du soja.

Utilisation d’un « commodity swaps » pour se couvrir contre la hausse des prix du pétrole, du blé, du riz etc.

Le principe de base est simple. Il s’agit de fixer le prix à terme de la matière première.

Un swap est un contrat de gré à gré portant sur l’échange des flux, lié à un actif sous-jacent à une fréquence donnée, sur une période déterminée.

Exemple d’un contrat de swap de couverture contre la hausse de prix du pétrole

L’Etat haïtien, sentant la hausse de prix du pétrole prochainement dû à un facteur géopolitique, souhaite se protéger contre cette hausse. L’Etat souhaite fixer son approvisionnement à $ 80.00 le baril sur un 6 mois. Imaginons qu’il confie la charge de cette opération à la Banque nationale de Crédit (BNC) qui va entrer dans une opération de swap avec l’assureur AIG ou une banque BNP Paribas.

Selon les termes du contrat, la BNC achète le pétrole au prix du marché international pour le compte de l’Etat auprès d’un fournisseur quelque conque. Si le prix de marché est supérieur à $ 80.00, AIG paie la différence à BNC et, si le prix de marché est inférieur à $ 80.00, BNC donne la différence à AIG.

Utilisation d’un contrat Future sur matières premières (pétrole, blé, Riz) comme moyen de se protéger contre la hausse des prix

Un Future est un contrat à terme standardisé, négocié sur un marché organisé (CME, CBT, LIFFE, NYMEX) permettant de s’assurer ou de s’engager sur un prix, pour une quantité déterminée d’un produit donné à une date future.

Un marché organisé est un marché où il existe une chambre de compensation. Quand les ordres sont passés, la chambre de compensation vient s’interposer et devient l’acheteur pour tous les vendeurs et le vendeur pour tous les acheteurs. Elle assume, à la place des participants, le risque de contrepartie.

Pour ce faire, chaque adhérent doit lui verser un dépôt de garantie. Ces dépôts de garantie sont réévalués tous les jours en fonction de la valeur de marché des positions détenues par l’adhérent.

Exemple d’un Future sur le blé utilisé contre la hausse de prix du blé

L’Etat pense que le prix du blé va augmenter sur le marché international dans 3 mois et veut se protéger contre ce risque de hausse.

Nous considérons toujours le cas de la BNC agissant pour le compte de l’Etat dans le cadre de l’opération.

On suppose que BNC est membre adhérent du marché londonien LIFFE, lui permettant de négocier les contrats Futures sur le blé. BNC va acheter des contrats Futures sur le blé pour le compte de l’Etat. Le contrat Future fixe à terme le prix de la tonne de blé, par exemple, à $ 240.00 / tonne.

Si, au bout de 3 mois, le prix du blé grimpe à $ 280.00 / tonne, la BNC achètera la tonne de blé pour le compte de l’Etat à $ 240.00 / tonne au lieu de $ 280.00 / tonne. Ainsi, l’Etat s’est-il protégé contre la hausse de prix du blé à travers l’achat des contrats Futures.

Utilisation des options comme moyen de couverture contre la hausse des prix du pétrole, du blé, du riz, etc.

Une option est un contrat donnant à son détenteur le droit et non l’obligation d’acheter ou de vendre une certaine quantité d’un bien à un prix préfixé (prix d’exercice), à une date déterminée d’avance, moyennant une prime. Il existe deux types d’option :

l’option européenne, qui ne s’exerce qu’à l’échéance ;

L’option américaine, qui peut être exercée à tout moment de la date de négociation jusqu’ à la date d’échéance.

Il faut savoir qu’une option d’achat s’appelle un CALL et une option de vente s’appelle un PUT.

Exemple d’une option sur matières premières (pétrole, blé, riz, etc.)

L’Etat pense que le prix du pétrole va augmenter sur le marché international et veut se protéger contre ce risque.

BNC, agissant pour le compte de l’Etat, va acheter une option d’achat sur le pétrole à un prix d’exercice, admettons $ 85.00 / baril sachant que le prix spot du pétrole est $ 88.00 / baril. Si, effectivement, le pétrole augmente dans 6 mois à $ 95.00 / baril par exemple, la BNC exercera l’option et achètera le pétrole à $ 88.00 au lieu de $ 95.00. Ainsi, l’impact de la hausse de prix du pétrole sur la population est-il neutralisé.

Gestion efficace des risques liés aux phénomènes climatiques

Les quatre derniers ouragans, qui ont frappé notre pays, auraient causé la mort de 793 personnes, 548 blessés, tandis que 22 702 maisons ont été détruites et 84 625 maisons endommagées, selon le bilan de la Protection Civile Haïtienne.

Les mots ne suffisent pas pour décrire l’image apocalyptique de la ville des Gonaïves.

Ces événements ont montré au moins deux choses.

D’une part, l’irresponsabilité de nos dirigeants durant ces dernières décennies, car les mêmes événements se sont produits en 2004 avec le cyclone Jeanne.

D’autre part, ces événements ont révélé nos faiblesses au niveau technologique, notre incapacité à construire des infrastructures capables de résister au moindre phénomène naturelle.

Là, encore, la réponse n’est pas de supplier la communauté internationale à nous envoyer quelques techniciens. Un économiste médiocre, soit-il, vous dira qu’il n’y a pas de développement sans technologie.

A l’heure où on parle de développement, où en sommes-nous au niveau technologique ? Quelles mesures préconise le gouvernement pour combler notre retard technologique ?

Nous préconisons la création d’un Institut haïtien de Technologie et d’un pôle technologique l’accompagnant. La technologie serait à la base de notre développement industriel, vecteur central de la croissance économique.

Nous souhaiterions qu’il soit une référence dans les Caraïbes.

Il s’agirait pour notre pays, dans les 10 années à venir, de disposer des techniciens capables de creuser un tunnel, capables de construire n’importe quels ponts et bâtiments complexes, de concevoir des systèmes électroniques complexes, etc.

Pour réduire la fréquence des catastrophes naturelles, les experts préconisent des activités de drainage et une meilleure gestion des bassins versants. Ce sont des mesures préventives qui vont dans le bon sens, mais, compte tenu de notre position géographique, le risque des ouragans demeure inchangé.

Dans ce qui suit, nous allons nous intéresser à la gestion de ces types de risques. Nous chercherons à montrer qu’il est possible qu’à chaque pluie diluvienne, qu’à chaque ouragan, que notre gouvernement n’aille plus supplier la communauté internationale de nous accorder une quelconque aide.

Peut-on se prémunir contre les grands risques liés aux phénomènes climatiques ?

Les "dérivés climatiques" sont les réponses appropriées à ce type de risques. Ils sont cotés en temps réel à la Bourse de Chicago (CME), mais aussi sur le LIFFE (Londres).

Les dérivés climatiques sont des produits d’assurance procurant une compensation pour des pertes ou manques à gagner liés aux aléas climatiques.

Une coopérative agricole, qui veut se prémunir contre la sécheresse, peut acheter des contrats lui assurant contre une température plus chaude au-dessus de la moyenne.

Des contrats, permettant de s’assurer contre les risques liés à une grande saison de pluies, existent sur le marché de Chicago.

Une coopérative agricole haïtienne peut tout à fait se prémunir contre les risques d’inondations, d’ouragans, en achetant des contrats à la bourse de Chicago. Il existe des contrats Futures et des options portant sur des indices mesurant la pluviométrie, la force de tempête, la température etc.

Exemple de couverture de risque de catastrophe avec un Cat-Bond ou Bon de catastrophe coté sur le CME

Un Cat-Bond est une obligation à haut rendement, généralement émise par une compagnie d’assurance ou de réassurance, sociétés industrielles, etc.

Dans le cas où survient un sinistre prédéfini (tremblement de terre, raz de marée, ouragan, etc..), le détenteur de l’obligation perd tout ou partie des intérêts, voire du nominal de l’obligation.

Ces obligations, d’échéance courte et souvent à taux variable, offrent des rémunérations très attractives ; en contrepartie, si le risque se matérialise, tout le capital peut être perdu. Le gouvernement haïtien, durant la saison cyclonique, peut donner mandat à la BNC de se couvrir contre le risque de catastrophe, via un Cat-bond coté sur le CME.

Présentation de l’un de plus grands marchés à terme du monde

Le Chicago Mercantile Exchange Group est l’entité résultant de la fusion en 2007 du Chicago Mercantile Exchange (CME) et du Chicago Board of Trade (CBOT). Il est l’un des marchés organisés de contrats à terme et d’options du monde.

En 2006, plus de 2,2 milliards de contrats, représentant plus d’un million de milliards de dollars, ont été négociés au CME et au CBOT. Les trois quarts de ces opérations ont été réalisés électroniquement.

CME propose une gamme complète de produits financiers couvrant les principales classes d’actifs, allant des contrats à terme et des options sur taux d’intérêt, indices boursiers, devises, matières premières, jusqu’aux produits d’investissement alternatifs, comme les contrats ayant trait aux conditions météorologiques.

CME Clearing est la chambre de compensation assurant le rapprochement et le règlement de toutes les opérations effectuées.

CME est un marché électronique ouvert 24 heures sur 24 et accessible partout dans le monde.

Il compte des clients dans plus de 80 pays du monde. Son architecture ouverte (CME Globex) permet aux clients de se connecter en utilisant leurs propres outils de négociation.

Jean-Eric PAUL

Economiste, Membre de l’Association Française des Analystes Techniques

Direction des Marchés de la Banque Dexia, Paris-La Défense

j_e_paul@yahoo.fr, jeaneric.paul@dexia.com

[1] Economiste, Membre de l’Association Française des Analystes Techniques. Direction des Marchés de la Banque Dexia, Paris-La Défense.

samedi 15 novembre 2008

HAITI: PROPOSITIONS AU GOUVERNEMENT ET AUX INVESTISSEURS...

Haïti : Propositions au gouvernement et aux investisseurs
Des idées….. Des idées mais…….
vendredi 14 novembre 2008

Par Ives Marie Chanel

Soumis à AlterPresse le 14 novembre 2008

Après les passages des cyclones et ouragans qui ont dévasté le pays et entraîné la perte de centaines de vies humaines, le gouvernement est venu en pompiers annoncer aux citoyens qu’un montant de 200 millions de dollars - tiré des fonds du programme Petro Caribe - allait être mis à contribution dans des interventions et projets de récupération.

Cette nouvelle a surpris plus d’un, car, par absence de transparence, les citoyens n’étaient ni informés de la disponibilité de ces fonds, ni, encore moins, de leur placement dans des banques étrangères.

Le réflexe de nos dirigeants n’a pas évolué ni dépassé celui affiché depuis des lustres par nos hommes d’affaires qui préfèrent importer des produits de base et les revendre en gros et en détail sur le marché local, plutôt que de jouer leur vrai rôle d’investisseurs par la création de véritables entreprises de production, génératrices d’emplois et de richesses.

Laissons de coté le débat sur les contraintes à l’investissement et concentrons-nous d’abord sur la nécessité de changer cette mentalité qui nous fait toujours penser le conjoncturel avec nos instincts égoïstes.

Aujourd’hui, après « les catastrophes des deux écoles », on se retrouve avec les mêmes formules et les mêmes solutions conjoncturelles… les mêmes démagogies qui se démarquent de toute démarche structurelle et constructive.

On se décharge de toute responsabilité et on annonce des mesures qui, j’en suis certain, ne dureront que l’espace d’un matin.

Ces catastrophes en cascade ne sont elles pas, pour nous, de sérieux avertissements, afin que nous prenions conscience de notre situation ?

Le problème d’Haïti n’est il pas les Haïtiens eux mêmes ?

Nous devons voir les choses autrement, refaire cette mentalité basée sur l’égoïsme, l’étroitesse de vues, l’absence de solidarité, les préjugés.

Il nous faut cesser de penser le court terme en regardant nos intérêts immédiats et personnels qui ne se résument qu’en commissions sur les projets, dilapidation des fonds alloués aux projets ou tout simplement au blocage de tout projet non compensé par des largesses de leurs promoteurs.

En complémentarité à un véritable projet visant à renforcer la capacité de l’Etat haïtien à garantir une instruction publique de qualité à tous les niveaux, le gouvernement pourrait procéder à la mise en place pour le secteur privé de l’éducation d’un projet parallèle, dont les étapes d’exécution pourraient être :

1.‐ Une évaluation structurelle et infrastructurelle des écoles ;

2.‐ la désaffectation graduelle des écoles jugées à risque ou logées dans des édifices inappropriés.

Cette désaffectation devrait se faire moyennant la mise à la disposition des écoles, dotées d’une viabilité financière et structurelle, de fonds pour la construction d’immeubles adaptés et répondant aux normes modernes.

Le financement pourrait être mis à la disposition de ces écoles à travers les banques d’Etat ou des structures privées, moyennant la mise à leur disposition par le gouvernement Haïtien d’un fonds de garantie.

L’Etat Haïtien pourrait identifier des espaces pour la construction d’écoles dans les grandes agglomérations (Zonage). Ces espaces pourraient être dotés, au préalable par les services compétents de l’Etat, d’espaces communautaires (terrains de jeux (Volley ball, Basket ball, football, piscine, piste d’athlétisme, gymnasium, parc, jardin botanique, etc.), d’infirmeries ou de dispensaires, de bibliothèques publiques, d’un sous commissariat de police, de salles de projection, Internet Wi fi (développer le concept de zones Wifi).

L’Etat Haïtien se chargerait du lotissement des parcelles, du drainage, de l’électrification et de l’approvisionnement en eau potable de ces véritables villages scolaires. Les parcelles seraient ainsi mises à la disposition des écoles pour la construction des édifices, selon leur taille et leur viabilité financière et structurelle.

Le gouvernement garantirait ensuite le transport des écoliers et des professeurs des différents villages, à des points d’arrêt prédéterminés dans les différentes agglomérations visées par le projet.

Ce projet permettrait de :

1. Réduire graduellement les risques de catastrophes et des pertes en vie humaines dans le secteur scolaire ;

2. Améliorer les conditions d’apprentissage ;

3. Améliorer les résultats au niveau scolaire ;

4. Améliorer le niveau des apprenants et le niveau de connaissance des futurs professionnels ;

5. Donner un plus grand accès aux nouvelles technologies, aux livres, à la pratique du sport aux couches défavorisées ;

6. Faciliter un meilleur contrôle et une meilleure évaluation des écoles ;

7. Contrôler le coût d’accès à l’instruction (contrôle de la scolarité et des frais scolaires) ;

8. Renforcer la pratique sportive et découvrir de nouveaux talents dans les domaines sportifs et artistiques ;

9. Garantir une meilleure sécurité par un contrôle plus efficace de ces zones par la police (les problèmes lies au kidnapping) ;

10. Impact certain sur l’environnement, le développement des villes et l’aménagement du territoire.

Trop beau pour être vrai, diront plus d’un.

Mais les possibilités existent.

Ce qui nous manque, ce sont peut être des idées et de la volonté de faire quelque chose, de travailler pour la postérité.

Le simple citoyen, que je suis, croit que le gouvernement Haïtien gagnerait plus à investir localement les revenus générés par Petro Caribe ou de l’ONA ??? Que de faire des placements dans les banques étrangères ?

Les millions de Petro Caribe pourraient permettre, par exemple, à l’Etat Haïtien, en partenariat avec une banque locale ou internationale, d’entamer la construction de routes nationales à quatre voies dotées de stations de péage.

Les revenus de ces droits de passage pourraient servir à l’entretien de ces routes ou encore à payer les faibles intérêts de ce prêt spécial du Vénézuéla.

L’Etat Haïtien ne pourrait-il pas s’engager dans le développement urbain par la construction de nouveaux quartiers, dotés d’immeubles qui pourraient être mis à la disposition des classes moyennes, des fonctionnaires à travers un système de crédit sur 20 - 30 années ?

De même dirons-nous : que perdra l’Etat Haïtien à investir mensuellement, pendant une certaine période, 10 % des recettes douanières de Malpasse (chiffrées mensuellement à 60 millions de gourdes) dans l’aménagement des aires frontalières de Fonds Parisien et de Ganthier ?

Que perdra l’Etat Haïtien en accédant à la demande des hôteliers du Nord d’éliminer le visa d’entrée pour les ressortissants dominicains et les touristes séjournant en République Dominicaine et en favorisant le développement du tourisme inter frontalier (Nos voisins dominicains sont en avance en éliminant le visa pour les Haïtiens détenteurs de visas américains et canadiens) ?

Que perdra l’Etat Haïtien dans la mise en place d’une zone touristique de libre commerce au niveau de l’axe Malpasse‐ Lac Azuei‐ Fonds Parisien pour contourner le protectionnisme dominicain, en permettant la libre circulation des dominicains jusqu’à Ganthier tous les week-ends ?

Cette mesure, ajoutée à la mise en place d’activités artistiques, sportives et culturelles autour du Lac Azuei, permettrait d’attirer nos voisins qui seraient servis hors taxes par des comptoirs de vente de produits haïtiens (rhum, clairin, boissons gazeuses, artisanat etc.) mis en place en collaboration avec le secteur privé sur le parcours de ce périmètre contrôlé par la police, les douanes et l’immigration.

Un projet novateur donc pour le Centre de promotion des investissements et le Ministère du commerce !

D’aucuns diront que je délire……

des idées ……….

Mais après … qui aura la capacité de les transformer en réalité pour le bien être commun.

mercredi 12 novembre 2008

HAITI - ACCIDENT: AU PAYS DE LA HONTE

Haiti-Accident : Au pays de la honte

mardi 11 novembre 2008

Par Nancy Roc

Soumis à AlterPresse le 11 novembre 2008

Les Haïtiens, un instant animés d’un espoir illusoire par la victoire de Barack Obama, sont tombés de haut le vendredi 7 novembre. La nouvelle s’est propagée, telle une traînée de poudre, de Pétion Ville à toute la diaspora haïtienne : le bâtiment abritant le collège « La Promesse Évangélique », à Nérette, un quartier de Pétion-Ville, vient de s’effondrer sur des centaines d’élèves.

« Horreur en Haïti », titre Radio-Canada à la une de son site. Choc. Désarroi total. Douleur. Les images dans les médias étrangers et sur le site de la MINUSTAH sont insoutenables. Petits corps broyés, visages transformés en masques mortuaires, des mains tendues, des yeux horrifiés. Encore un drame. Un drame de trop ?

Oui, sans doute pour ceux qui ont encore une âme au pays des zombies. Mais et les autres ? Et les responsables ? Que font-ils ? Que feront-ils ? Cela changera-t-il quelque chose ?

L’irresponsabilité proverbiale des dirigeants haïtiens nous conduit à l’implacable conclusion : NON, ils ne feront rien ! Dans quelques jours, quelques semaines, la vie ou plutôt la survie reprendra son cours. Avec sa litanie de drames, d’horreurs, de faits inacceptables.

Cet été, le pays a été dévasté par le passage de quatre ouragans consécutifs en un mois. Bilan : plus de 600 morts, principalement dans la ville des Gonaïves. Selon nos informations, le collège « La Promesse Évangélique », peut accueillir près de 700 enfants, du cycle primaire au secondaire. Un collège au fond d’un ravin, sans route d’accès. Un collège dont le nom résonne tel un parjure. On compte encore les victimes : plus d’une centaine de morts, plus de 150 blessés et, 48h après le drame, il y a peu d’espoir de retrouver des survivants. Le bilan de la tragédie de « La Promesse Évangélique » sera-t-il beaucoup plus lourd que celui des quatre ouragans ? « L’école a un effectif de 700 enfants, mais ils travaillent en double vacation, ce qui veut dire qu’à l’heure où l’accident s’est produit on peut considérer qu’il y avait 350 écoliers à l’intérieur », a précisé Evans Lescouflair, ministre haïtien de la Jeunesse et des Sports à l’AFP. Même s’il a raison, 350 enfants sacrifiés au nom de la gabegie politique et de l’apathie sociale, c’est plus que honteux : c’est monstrueux.

Les résultats d’un populisme mortifère

L’effondrement de cet établissement découle de plusieurs raisons : le matériel utilisé pour sa construction ne répondait pas aux normes. De plus, le pasteur Augustin Fortain, propriétaire de l’école, l’aurait lui-même construite, sans l’aide d’ingénieurs. Suite au drame, la mairesse de Pétion-Ville, Lydie Parent, s’effondre au micro des journalistes : « Nous avions déjà interdit cette construction, mais le propriétaire n’a pas obéi à nos ordres », déclare-t-elle, en admettant que sa municipalité est en partie responsable de cette catastrophe.

Les secouristes s’affairent : des locaux aux étrangers, ils défilent tel un cortège funèbre. Les autorités aussi : du président René Préval au Premier ministre, Michèle Pierre-Louis, en passant par différents ministres, ils sont tous là à constater encore une fois le résultat d’un pays en faillite, un bateau sans gouvernail. Les accusations, parfois incendiaires, fusent contre ceux supposés « diriger » le pays. Seulement voilà : personne ne dirige plus ce pays depuis des années. Tout le monde se déresponsabilise, à commencer par le président. Alors, comment les choses pourront-elles changer ?

Depuis des années, la presse haïtienne dénonce la monstrueuse bidonvilisation et la ruralisation de la capitale. Les constructions anarchiques poussent telles des champignons avec la complicité et le cynisme des autorités. Aucun écho aux avertissements des journalistes. Des cris dans le désert.

Au nom du populisme, les autorités laissent faire le peuple. Pire ! Lorsqu’Yvon Neptune, architecte de formation et ex-Premier ministre sous le second mandat de Jean-Bertrand Aristide, a souhaité détruire les constructions anarchiques en commençant à les raser avec des bulldozers, sur instruction de son chef Jean-Bertrand Aristide, il a dû revenir sur sa décision. Il était apparemment plus important de ne pas déplaire à la population des bidonvilles afin de compter sur elle et ses chimères pour les manifestations de rue contre les opposants au populisme.

Aujourd’hui, il est sans doute trop tard pour arrêter la gangrène de la bidonvilisation qui menace toute la capitale, à commencer par les pauvres des bidonvilles. En témoigne, le silence embarrassé du président Préval qui, pressé par les questions des journalistes concernant les actions urgentes à mener contre le phénomène de la bidonvilisation, n’a pu expliquer cette catastrophe que par « le désordre qui règne dans le pays ».

Récemment, René Préval a attribué les méfaits ravageurs du déboisement à la colonisation, l’occupation américaine et la dictature des Duvalier. Aujourd’hui, selon lui, des enfants sont morts par centaines à cause du « désordre qui règne dans le pays » : pays qu’il dirige depuis 18 ans avec son « frère jumeau », Jean-Bertrand Aristide.

Si le président lui-même n’a que ces réponses à fournir, qui mettra de l’ordre dans le pays ? Qui responsabilisera le peuple ? Qui arrêtera la litanie des drames affectant quotidiennement le peuple haïtien, semant le deuil et la désolation au sein d’une population dont la survie dépend fondamentalement de l’aide de la communauté internationale et de l’encadrement des ONG ? Quand cesserons-nous d’être le pays de la honte ?