vendredi 13 février 2009

POUR REFORMER LA CONSTITUTION DE 1987...

POUR REFORMER LA CONSTITUTION DE 1987 : LE GRAND CONGRES DE L’ENTENTE INTERHAITIENNE

Par Amary Joseph NOEL

« Il s’est fait un courant d’idées que Haïti
est le plus grand pays consommateur de Constitutions.
Cependant, une analyse patiente de la genèse
des différents textes constitutionnels haïtiens permet d’affirmer
que notre pays n’a connu depuis sa naissance comme nation
qu’une seule Constitution formatée différemment
plus d’une vingtaine de fois. La méthodologie choisie en est la cause ! »
Amary Joseph NOEL,
(Voir le Nouvelliste du 30 octobre 2007, No.37.737 , pages 25 et 30)

Les espoirs suscités par l’arrivée d’une première famille noire à la Maison Blanche et à la tête de la nation la plus puissante du monde évoque pour nous l’épopée des preux de 1804. Ils nous ramènent en ces temps mémoriaux ou le « premier des Noirs » ( Toussaint Louverture) s’adressait avec panache et dignité au « premier des Blancs » ( Napoléon Bonaparte). Ils évoquent pour nous la posture humaniste du Grand Alexandre Pétion, qui chef d’Etat d’une « Haïti, puissance du monde » apportait son support en combattants, or et armes à Simon Bolivar pour la libération de l’Amérique du Sud. Le pays à qui le « monde civilisé » d’alors refusait les attributs du « droit de conquête » était leader du monde libre.

Il est clair qu’un idéal de Grandeur et de Liberté hantait nos ancêtres. Les preux de 1804 sont les pionniers du monde libre !

Les Haïtiens se sont battus au Mexique, en Amérique du Sud et ailleurs pour la libération des peuples opprimés et la liberté. Ils ont porté sur les fonds baptismaux l’étendard de la décolonisation et de la liberté. Par où sommes nous passés pour arriver là où nous sommes aujourd’hui ?

La genèse de notre nation nous prédestinait, pourtant, à un idéal et une vie de fierté, de bonheur et de grandeur !

La place qu’occupe, aujourd’hui, notre mère patrie Haïti dans le concert des nations n’est pas des plus enviables. Et plus d’un leader haïtien semblent se complaire sous la coiffe de « la nation la plus pauvre de l’Amérique ». Nous n’avons recensé aucun effort réel des décideurs pour mettre le peuple à produire et à espérer. Nous avons démissionné ! Nous sommes devenus des fatalistes, voire des abouliques incapables de ramasser le « gant », de se battre pour une vie meilleure.
Nous voulons aujourd’hui porter nos compatriotes de partout à revendiquer « le droit de revendiquer » un meilleur sort que celui qui nous est dévolu par les choix erronés et deux siècles d’anti-gestion et de brigandages.

Le moment Obama est celui de tous les espoirs. Le monde est en train de changer ! L’Amérique est en train de changer ! Il y a une opportunité à saisir. La face du monde est en train de changer ! Il y a un train à prendre. La chance est offerte à toutes les nations et surtout à la Première République noire du monde de s’interposer en interlocuteur valable sur l’échiquier mondial. Pour Haïti, le train de la dernière chance est en mouvement sur les rails. C’est à nous de le mettre à notre portée. Il nous faut à tout prix revenir aux promesses de grandeur de nos premiers « balbutiements » comme nation et peuple.

Pour ce faire, nous avons, après âpres réflexions, décidé d’interroger la praxis constitutionnelle haïtienne !

Une Constitution, la loi-mère d’un état, est , en réalité un projet de société qui spécifie les libertés publiques ou fondamentales dont devront jouir les citoyens , organise les pouvoirs publics et structure les rapports entre eux. C’est à bon escient qu’il sied d’interroger la Constitution quand un pays n’est pas arrivé au développement ou à conduire ses nationaux à la paix et au bonheur.

Le plus grand projet de l’Haïti, d’aujourd’hui, doit être une quête de paix et de réconciliation. La paix durable en Haïti passe par la commission d’une Constitution vraiment nationale. Autant dire que la Charte suprême haïtienne dans ses multiples versions inspirées ou copiées sur l’étranger n’a pas pu prendre acte du vécu sur le territoire légué par la première révolution nègre de la planète.

Pour répondre à la préoccupation constitutionnelle nationale, nous proposons que des efforts à portée révolutionnaire soient déployés. Nous invitons décideurs et tenants du 5ème pouvoir (La Société Civile) à l’audace et à des prouesses à la fois titanesques et épiques. Compatriotes haïtiens, ne touchez pas la Constitution haïtienne de mains molles !

C’est en dotant notre pays d’une Constitution digne de ce nom, réalisée dans la concertation et l’entente citoyenne que nous pourrons manifester au monde notre volonté d’emprunter la voie du changement. C’est une Constitution « vraiment nationale » qui nous permettra de détruire la thèse répandue, pernicieuse et dévastatrice de « l’impossibilité du changement en Haïti ».

Cessons de dire : « Ce pays est foutu ! », « Ce pays ne changera pas », « Ce pays n’ira nulle part ! », L’assimilation de la thèse de l’impossibilité du changement en Haïti est pire que la misère elle-même. Disons tout haut qu’il est temps que les Haïtiens de l’intérieur et de l’extérieur se mettent en ensemble, s’amassent en blocs de compétences pour sauver la nation en péril. Oui, Haïti rêve d’une Constitution vraiment nationale ».

D’application réduite après le référendum qui lui a donné droit de cité, la Constitution de 1987 a été totalement mis en veilleuse par deux occupations étrangères en moins de 10 ans.

S’il y a plus d’une année, nous avions pris position en ce qui concerne les dégâts causés par les turbulences intestines au pays sous l’égide de la Constitution de 1987,nous ne pouvons que couver d’inquiétudes quand nous entendons, ces jours-ci, hommes d’Etat, dirigeants de partis politique et membres du 5ème pouvoir (Société Civile) parler d’amendement ou de réforme de la Constitution en vigueur dans le « strict respect des procédures prévues. » Certains ont été jusqu’à « épeler » les chapitres tabous auxquels, on ne devrait pas toucher. Si l’on choisit de réformer ou d’amender au jugé, la Constitution de 1987, Haïti sera bien partie pour un autre siècle de brigandages dans la pauvreté, la crasse et la misère.

Comment prétendre amender une Constitution qui s’est révélée inadaptée ! Pourquoi les circuits de pouvoirs haïtiens ont-ils choisi l’option conformiste de retoucher une loi mère quand cette dernière s’est révélée incapable de réaliser son mandat sacro-saint : « défendre la vie de tous et la Souveraineté nationale ».

« Sous l’égide de la Constitution de 1987, Haïti a connu un massacre électoral, quatre (4) coups d’état, deux occupations étrangères et l’agression de la cité par les gangs radicalisés des bidonvilles. Le bilan est monstrueux! »(cf. Le Nouvelliste du 30oct. 2007)

Les membres du 5ème pouvoir ne peuvent et ne doivent pas rester les bras croisés et assister bouche bée à une initiative qui risque d’hypothéquer les dernières chances d’Haïti. Nous invitons tout un chacun à apporter sa quote-part à l’érection de la vraie base à donner à notre société en désarroi. Haïti n’ira pas de l’avant tant que les Haïtiens ne se décident pas à doter le pays d’une constitution « vraiment nationale ».

« Depuis l’indépendance, Haïti n’a connu qu’une seule constitution reformatée ou amendée 21 fois. La méthodologie utilisée en est la cause. Les Constitutions haïtiennes ont toujours été le fruit de travail d’une commission ad hoc , des points de vue individuels élevés au rang de loi suprême dans une dynamique messianique de mauvais aloi.. » En ce qui concerne la Constitution Haïtienne de 1987,nous avons déjà proclamé que « le ver est dans l’embryon ». Des articles anticonstitutionnels ou inconstitutionnels... des redites... de graves lacunes...voire des contradictions y sont relevées après simple lecture des chapitres. Le moule choisi pour le produire ne pouvait donner mieux ! La « méthodologie commise pour sa conception la prédisposait à répéter les erreurs des versions antérieures de la Charte Fondamentale qu’elle était censée corriger.

Et, si les décideurs n’engagent pas la société nationale toute entière dans une œuvre à la fois inédite et d’envergure, Haïti ira de charybde en scylla. La nouvelle Constitution haïtienne pour être digne de ce nom devra être le fruit d’une grande concertation, d’un grand débat national que nous avons baptisé à la Confédération des Haïtiens pour la Réconciliation (CHAR), GRAND CONGRES DE L’ENTENTE INTERHAITENNE.

Tout compte fait, au lieu de demander à des clercs éminents de produire un document et d’appeler le peuple à l’approuver dans un brouhaha référendaire sans l’avoir lu ou compris, il sied de mobiliser la nation entière dans un grand débat dont l’issue recherchée doit être la concorde, l’entente entre frères et un plan de développement incluant le cours, le moyen et le long terme.

Haïtiens, nous devons nous décider à nous prendre en charge et prendre le pays en mains. Ceci passe par la mise en branle d’une véritable croisade dont l’objectif doit être de mettre frein aux pratiques de division, de pilotage à courte vue, d’improvisation et d’égoïsme. Une révolution s’impose ! Elle doit être pacifique. Il faut à tout prix changer la méthodologie de préparation ou d’amendement de la Constitution. Les verbalisations et les expériences de tous les secteurs et de toutes les couches de la société doivent être mises à contribution.

Il est grand temps de mettre à l’écart les intérêts mesquins de clans pour penser au pays , à son avenir et au devenir des enfants qui grandissent. Changer quelques chapitres de la Constitution de 1987 dans le cadre d’un amendement peut , sans doute, servir les ambitions inavouées d’une clique. Mais, l’important est de se demander : quelles considérations pour le pays et la collectivité haïtienne dans tout cela ?

Au lieu de créer une commission composée d’une cinquantaine de Constituants qui s’inspireront de Constitutions étrangères pour produire un texte iconoclaste, il faudra revisiter l’histoire nationale et faire un vrai bilan de la praxis de gestion du territoire national pendant plus de deux siècles. Une Constitution copiée sur l’étranger ne saurait combler les espérances d’une nation, encore moins celles d’une bande de noirs impudents qui ont saboté tous les projets dominants des nations « civilisées » à l’aurore du 19ème siècle. Le moment est venu de nous grouper pour poser les grandes questions nationales? Faisons-le avec l’audace des grands révolutionnaires !

Le train de la dernière chance est en train de passer. Si nous le ratons, nous pourrons dire définitivement adieu au développement. L’ambition politique effrénée et le désir d’être au pouvoir pour jouir et s’enrichir, rendent nos leaders aveuglent. D’ailleurs, Haïti a la chance de pouvoir compter sur un Chef d’Etat sur le point de clore deux mandats constitutionnels. Nous l’invitons à se hisser à la dimension des grands défis nationaux dans un monde à la fois en crise et en pleine mutation.

L’organisation du GRAND CONGRES DE L’ENTENTE INTERHAITIENNE, est la voie altière pour la conquête d’une constitution vraiment nationale. La condition de base de la tenue du GCEIH est la volonté claire de l’Etat haïtien dans ses structures les plus élevées et sa représentativité la plus haute. A notre point de vue, il pourrait comprendre trois phases principales :

A) Phase Préliminaire

La Commission d’une ASSEMBLEE NATIONALE GENERALE CONSTITUANTE composée de représentants de toutes les couches sociales, de tous les secteurs, des partis politiques, de toutes les institutions majeures de la société haïtienne ( l’Eglise, les forces publiques, le Sport, l’Education, les 5 pouvoirs ( l’Exécutif, le Judiciaire, le Législatif, la Presse et la Société Civile) dans le strict respect de la donne géographique : Constituants nationaux en provenance des institutions majeures, Constituants représentants les Haïtiens vivant à l’étranger et Constituants départementaux Il doit s’agir de personnalités mandatées par les secteurs au lieu de « missionnés » envoyés par les sphères de décision au plus niveau.

B) Phase de mobilisation
Mobiliser tout le peuple haïtien pour le changement et le progrès par la transformation des consciences. Prendre une année au moins pour engager la nation entière, via une campagne médiatique idéologique massive, dans un effort de redressement national avec pour objectif la réconciliation nationale, la paix et développement durable : débats constructifs, curage des plaies profondes, vidange des contentieux historiques ( y compris les relations avec la République Dominicaine), évaluation et collecte de recommandations sur la base d’échantillons aléatoires, choix d’un nouvel mode de gestion du territoire national et de système de gouvernement.

C) Le Congrès proprement dit

Il s’agira d’entrer en salle pendant environ une douzaine de jours.
Ce sera le creuset d’une révolution pacifique. Cette étape suppose la codification de l’ensemble des recommandations, l’extrapolation des résultats et la préparation d’un plan de développement. Les extrants devront être une CONSTITUTION VRAIMENT NATIONALE et un plan de développement de 5,10, 15, 25, 50 ans imposable, comme cadre de gestion imposable à tous les futurs dirigeants de l’Haïti moderne.

Amary Joseph NOEL,
Coordonnateur Général de la Confédération des Haïtiens
pour la Réconciliation (CHAR)
e-mail : profamaryjosephnoel@ Yahoo.fr
Port-au-Prince, le 25 janvier 2009