dimanche 9 mars 2008

PORTRAIT D'HAITI...

Portrait d’Haïti : Deux mots sur les découvertes d’un chroniqueur canadien
samedi 8 mars 2008

Débat

Par Gary Olius

Soumis à AlterPresse le 5 mars 2008

En six jours, comme le grand Dieu qui a créé l’univers, un chroniqueur canadien croit avoir peint une image parfaite d’Haïti. J’ai examiné son chef-d’œuvre à la recherche que j’étais de cette extase que certains canado-haitiens m’ont fait part pour l’avoir eux-mêmes contemplé. Oh oui, je l’ai examiné avec ma raison tandis que d’autres – il me semble – ont été conditionnés à l’admirer ; c’est peut-être là toute la différence… J’ai passé au peigne fin le papier tel qu’il a été repris, assorti d’une introduction laudative, par un quotidien d’Haïti. Je l’ai lu, l’ai relu, j’y ai vu des vérités, des demi-vérités, des tentatives de galvaudage et j’y ai vu aussi des mensonges abjects. [1]
Ma démarche ici n’est pas pour présenter un compte-rendu de lecture de ce texte dont je ne connaîtrai jamais le vrai but, elle n’est non plus pour commenter systématiquement tout ce qui y a été relaté, elle est plutôt pour répondre à une accusation voilée du chroniqueur qui fait de l’Haïtien un menteur pathologique et aussi pour commenter son idée (…) faisant croire que l’amour de l’Haïtien pour son pays est une espèce de masturbation.
Le « savant-chroniqueur » a su faire, en six jours, ce que des spécialistes d’Haïti comme Mats Lundahl, Gérard Barthélemy, Caprio etc… n’ont pas pu faire durant toute leur carrière de chercheur. Comme par miracle, il a découvert que ‘personne ne dit la vérité dans ce foutu pays’. Cette généralisation dont lui-seul a le secret, il l’a tirée de son contact avec un certain Lenz qui sera sou peu au Canada et de deux Haïtiennes qui ont vécu au Canada. On dirait que Monsieur Lagacé a été envoyé pour prêcher cette vérité inexistante en Haïti, ressortissant qu’il est d’un pays qui en a le monopole.
Personne en Haïti ne dit la vérité, donc, l’Haïtien est le prototype même du mensonge. Il ne peut être homme de science, il ne peut rien construire, il est à fuir et est tout juste bon pour la prison. Pourtant, lors de son séjour dans ce pays du mensonge, le chroniqueur a cru pouvoir tirer des données et des informations de la bouche des menteurs qu’il a rencontrés, matière première pouvant lui permettre de garnir de vérités son carnet de diagnostics (pardon ! de voyage). Et comme à Port-au-Prince, dit-il, il y a toutes les pollutions, l’homme véridique qu’est Lagacé y a peut être pollué son esprit, son jugement et sa moralité et c’est assurément pour cela que dans son texte il utilise abondamment le mot “bullshit”et a accouché tant d’autres perles rares de la même espèce. Je regrette que, comme beaucoup d’étrangers pressés de tirer des conclusions sur Haïti, il ne réalise pas que l’Haïtien est comme un miroir clair et fidèle, en le regardant de très près l’observateur ne peut se faire de doute sur ce qu’il voit. Son propre visage…
On dirait aussi que l’amour que les Haïtiens nourrissent pour Haïti agace Lagacé, puisque son diagnostic l’amène à croire dur comme fer qu’on ne saurait aimé un pays cassé. Sans concession, il dit : “C’est peut-être cet amour qui les pousse, remarquez, à constamment bullshiter”. Si je parlais son langage, je lui dirais : c’est aussi bullshiter de prétendre que Haïti s’est cassée d’elle-même et que le poids du colonialisme ou de son pendant moderne - l’impérialisme rampant - n’y est pour rien. M’accrochant à mon latin, je vais rendre Lagacé plus agacé en lui apprenant que l’amour de l’Haïtien pour son pays (son patriotisme même) a subi deux siècles de bombardement massif et a remarquablement résisté. Les formules du genre “Haïti n’existe pas”, “Haïti est un pays Cassé”, “Haïti, premier H des 4H/SIDA” etc. sont très familières à tous les haïtiens et n’ont pas su saper leur attachement pour leur terre. C’est d’ailleurs ce qui rend fous de rage des envoyés comme lui. Le patriotisme haïtien résiste à la pauvreté n’étant pas basé sur le matérialisme plat, il résiste au dénigrement n’étant pas une simple image peinte pour la consommation des médias, il est imperméable à la médisance étant pourvu d’une réalité invariable et il restera à jamais indestructible car il est d’une nature insondable et insaisissable…

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